Jeux paralympiques: Timothée Adolphe aveugle, main dans la main avec des valides

Timothée Adolphe, non-voyant, représentera la France en athlétisme sur le 100 m et le 400 m. A 26 ans, celui qui a déjà brillé au niveau européen veut étoffer son palmarès à Rio. Il est accompagné de Jeffrey John pour le 100 m. Fadil Bellaabouss sera à ses côtés sur le 400 m. Rencontre.

De notre envoyé spécial à Rio,

Installez-vous sur le starting-block d’une piste d’athlétisme, fermez les yeux et lancez-vous ! Quelques mètres plus loin, vous découvrirez que vous n’avez pas couru droit. Voilà pourquoi Timothée Adolphe, aveugle, fait sa course sur le 100 mètres et le 400 mètres avec des athlètes valides. Celui que l’on surnomme le « Guépard blanc » fut inspiré par l’athlète non-voyant Aladji Bâ, médaillé à Sydney en 2000. Timothée Adolphe, 26 ans, a débuté sa carrière en 2011 après avoir rencontré d’Arthémon Hatungimana, médaillé aux Mondiaux de 1995 sur 800 mètres. Depuis, il ne cesse de progresser.

Une vraie amitié

A Rio, deux guides l’accompagnent. Pour le 100 mètres, il fait alliance avec Jeffrey John. Les deux forment « un vrai petit couple », selon Timothée Adolphe. Pourtant, ils courent ensemble depuis peu de temps.  « On voudrait faire de belles choses. J’avais besoin d’un guide rapide pour faire des performances », s'enthousiasme-t-il. Pour le 400 mètres, Fadil Bellaabouss sera avec lui.

Une relation athlète et guide ne fonctionne que sur la confiance. Sauf qu’il faut composer avec le caractère de chacun. Dans la préparation des Paralympiques, il y a eu forcément de la tension, du stress et des moments compliqués. « C’est comme une vraie amitié ou une relation de couple. Il y a des hauts et des bas. C’est à l’image de la vie, c’est les montagnes russes », narre un peu philosophe Timothée Adolphe. Des propos qui font rire Jeffrey John.

A la base il y a une technique de course, mais la relation entre le guide et lui est primordiale. Surtout durant la compétition, un moment où il y a peu de paroles, juste des codes. Avec ses deux compères, Timothée Adolphe a travaillé le départ et la synchronisation à l’arrivée. L’athlète handisport doit absolument passer la ligne en premier sous peine de disqualification. « C’est quelque chose sur lequel on insiste beaucoup », avoue-t-il.

Une grosse responsabilité pour Jeffrey John

« Une médaille et un record personnel ce serait super. Ce que je voudrais, c’est qu’il se dépasse et qu’il aille le plus loin possible », souffle Jeffrey John. « C’est une grosse responsabilité, car je le fais pour moi, mais aussi pour quelqu’un d’autre et je ne dois pas faillir. Cela se répercute sur ses performances et ses résultats ». Jeffrey John a donc un rôle primordial dans le rêve de son complice avec qui la communication passe par le bras.

« C’est un langage du corps. Nous sommes attachés par le poignet et nos deux bras finissent par ne faire qu’un », avance Timothée Adolphe qui veut être reconnu pour ses performances et rien d’autre. Ce qui lui fait dire : « C’est encore compliqué pour des jeunes de faire du sport en tant qu'handicapé. Il y a encore un gros manque d’information. Si je peux aider à faire évoluer les mentalités, je le ferais volontiers, et ceci grâce à mes résultats. »

« Etre guide, c’est pouvoir donner confiance, courir vite et aider Timothée à se sentir bien pour qu’il soit au maximum relâché durant sa course », conclut de son côté Fadil Bellaabouss. « Ma première interrogation a été de savoir si je pouvais assurer. Ce n’est pas un rôle anodin, il faut être au top pour ne pas le pénaliser », raconte-t-il.

« Je n’ai pas de temps à perdre avec un aveugle ! », avait dit il y a quelques années un coach à Timothée Adolphe. Aujourd’hui, des millions de personnes auront les yeux rivés sur leur écran de télévision pour suivre ses exploits.

Partager :