Quinze matches, quinze défaites, une moyenne de dix points marqués par rencontre pour soixante-cinq encaissés. Les statistiques de la Namibie lors des Coupes du monde de rugby n’incitent pas à l’optimisme. Pourtant, les Namibiens en sont persuadés, ils vont remporter leur premier match lors du mondial en Angleterre (18 septembre – 31 octobre). « La préparation s’est très bien passée. Dans son histoire, la Namibie n’a jamais eu une équipe aussi forte, assure l’ailier de 26 ans Conrad Marais, qui évolue à Béziers, en Pro D2 (deuxième division, ndlr). On est vraiment capables de remporter notre premier match en Coupe du monde, contre le Tonga ou la Géorgie. Je suis sûr qu’on peut le faire. On a beaucoup d’espoir et on est impatients d’en découdre. »
Une défaite record 142-0 en 2003
La vingtième nation mondiale – la plus mal classée des vingt engagés – a déjà coché le 29 septembre et le 7 octobre sur son calendrier, dates auxquelles elle affrontera le Tonga (11e du classement des nations) puis la Géorgie (16e). C’est là qu’elle aura une chance d’empocher une victoire historique pour sa cinquième Coupe du monde consécutive, elle qui n’a manqué aucun grand rendez-vous depuis sa première participation en 1999. Car ses deux autres adversaires, la Nouvelle-Zélande, double championne du monde et tenante du titre, ainsi que l’Argentine, troisième en 2007 et quart de finaliste en 2011, évoluent sur une autre planète. « On est tombés dans un groupe très fort, on affronte la Nouvelle-Zélande en premier, ça va évidemment être très difficile, reconnaît Theuns Kotzé, 28 ans, demi de mêlée de Bourg-en-Bresse en Fédérale 1 (troisième division). Mais on s’est entraînés dur pendant deux mois et demi. On est prêts et excités. C’est une étape importante pour nous. »
Importante car elle pourrait permettre à la Namibie de sortir, au moins quelques instants, de l’ombre de l’imposante Afrique du Sud, championne du monde à deux reprises (1995 et 2007). Et, surtout, de s’affirmer comme une nation montante du rugby mondial. Depuis 1999, les « Welwitschias » ont franchi plusieurs paliers, en s’imposant notamment comme la deuxième meilleure équipe d’Afrique derrière les Springboks. Ils ont ainsi remporté à cinq reprises la coupe d’Afrique (2002, 2004, 2009, 2014 et 2015), une compétition que ne disputent plus les Sud-Africains. « Au Mondial 2003, on avait encaissé une défaite record, 142-0 contre l’Australie. Depuis, l’équipe a énormément progressé, les joueurs sont plus compétitifs », confirme Theuns Kotzé.
Moins de 12 000 licenciés et des joueurs amateurs
Pour cela, ils sont nombreux à avoir quitté la Namibie pour jouer dans des championnats plus relevés. Parmi les trente-et-un joueurs retenus pour le Mondial par le sélectionneur écossais Phil Davies, successeur de Danie Vermeulen, qui a démissionné en juin, vingt-et-un jouent à l’étranger : onze en Afrique du Sud, six en France, deux en Angleterre, un en Nouvelle-Zélande et un en Roumanie. « Il y a des grands joueurs comme Renaldo Bothma qui joue aux Sharks (Afrique du Sud), ou Jacques Burger qui joue aux Saracens (Angleterre), précise Conrad Marais. Il y a aussi beaucoup de jeunes joueurs avec un grand potentiel. »
La marge de progression de la Namibie n’est pourtant pas illimitée. Le pays d’Afrique australe et ses quelques deux millions d’habitants ne comptaient que 11 600 licenciés en 2014. A titre de comparaison, la France en possèdent plus de 291 000, l’Afrique du Sud 342 000. « En Namibie, il y a beaucoup de joueurs amateurs qui doivent travailler à côté du rugby, explique Theuns Kotzé. C’est une approche du rugby très différente de celle de la France. Et le niveau n’est pas du tout le même. » « Dans notre équipe, il y a environ 50% des joueurs qui ne sont pas professionnels, enchaîne Conrad Marais. En France, il y a plus de puissance, plus de vitesse. On a beaucoup travaillé là-dessus pendant la préparation, pour rattraper notre retard. »
Pour poursuivre son développement, la Namibie a besoin de jouer contre des adversaires de haut niveau. Et pas seulement une fois tous les quatre ans, lors de la Coupe du monde. « Pour progresser, on a besoin de jouer plus de matches contre des grandes équipes, reconnaît Conrad Marais. Ces dernières années, on jouait beaucoup contre le Kenya, le Zimbabwe et d’autres équipes africaines. Mais récemment on a joué contre les Etats-Unis, le Canada, la Roumanie qui sont un niveau au-dessus. C’est la clé pour franchir des paliers. » Et quand on lui demande s’il n’a pas peur de repartir d’Angleterre avec quatre défaites dans les valises, sa réponse est immédiate : « Ici en Namibie, on n’a peut-être pas les meilleurs joueurs, mais on joue avec le cœur. On y croit. »
Les 31 Namibiens retenus pour le Mondial
Avants : Johannes Coetzee (Brive/FRA), AJ de Klerk (University of Stellenbosch/AfS) Jaco Engels (United, NAM), Raoul Larson (SWD Eagles/AfS), Johnnie Redelinghuys (Wanderers/ Namibia), Casper Viviers (Saint Nazaire/FRA), Louis van der Westhuizen (Leopards/AfS), Torsten van Jaarsveld (Free State Cheetahs/AfS ), Janco Venter (University of Stellenbosch/AfS), Tjiuee Uanivi (Brive/FRA), Renaldo Bothma (Sharks & Pumas/AfS), Jacques Burger (Saracens/ANG), Wian Conradie (University of Johannesburg/AfS), Leneve Damens (Wanderers/NAM), Tinus du Plessis (Wanderers/NAM), Rohan Kitshoff (Durbell/AfS), PJ van Lill (Dax/FRA).
Arrières : Eneill Buitendag (Wanderers/NAM), Eugene Jantjies (Farul Constanta/ROU), Damien Stevens (University of Western Cape/AfS) Theuns Kotzè (Bourg-en-Bresse/FRA), Darryl de La Harpe (Western Suburbs/NAM), Johan Deysel (Leopards/AfS), JC Greyling (United/NAM), Danie van Wyk ( United/Namibia), Conrad Marais (Beziers/FRA), David Philander (Spotswood United/NZL), Heinrich Smith (Leopards/AfS), Russell van Wyk (Western Suburbs/NAM), Chrysander Botha (Exeter Chiefs/ANG), Johan Tromp (Wanderers/NAM).
Résultats des matches de préparation de la Namibie
6 juin : Tunisie – Namibie 14-22
12 juin : Namibie – Argentine Jaguars 10-30
17 juin : Roumanie – Namibie 43-3
21 juin : Espagne – Namibie 20-3
11 juillet : Namibie – Russie 39-19
18 juillet : Namibie – Russie 45-5
8 août : Namibie Kenya 46-13
15 août : Namibie – Zimbabwe 80-6
Programme de la Namibie à la Coupe du monde
24 septembre : Nouvelle-Zélande – Namibie (à Londres)
29 septembre : Tonga – Namibie (à Exeter)
7 octobre : Namibie – Géorgie (à Exeter)
11 octobre : Argentine - Namibie (à Leicester)