Un contexte difficile
L’urgence et la gravité de la crise environnementale, qui est une composante de la crise globale, nécessite des réponses à la hauteur des défis qu’elle doit résoudre. Or, depuis les engagements électoraux du nouveau président, le message est devenu trouble.
Il y a eu l’affaire de l’accord entre les socialistes et Europe écologie les verts où il a été question de la disparition de quelques lignes du texte original sur le nucléaire. Puis, on a observé le débarquement du ministre de l’Environnement en plein sommet de Rio+20 pour avoir eu un différend avec le groupe pétrolier Shell à propos d’un forage au large de la Guyane. Enfin, on a entendu divers commentaires de membres du gouvernement en faveur du nucléaire et de l’exploitation des gaz de schiste qui ont inquiété les écologistes.
Cette conférence, qui était déjà programmée pour la rentrée, a de toute évidence voulu marquer la fin de cette situation confuse. Elle a amené le gouvernement à donner des gages sérieux sur ses intentions pour notamment rassurer ses alliés et les acteurs de la société civile comme les ONG.
La conférence environnementale
La conférence environnementale du 14 et le 15 septembre au Conseil économique, social et environnemental a rassemblé pendant deux jours de nombreux experts en présence de 14 ministres (absence remarquée du ministre de l’Education) et de nombreux élus.
L'ouverture a été assurée par le discours du chef de l'Etat, François Hollande, durant lequel il a fixé le cadre général de la politique environnementale pour le quinquennat. Puis, il s'est clôturé, après consultation de tous les acteurs de l’environnement, par un discours du Premier ministre Jean-Marc Ayrault, qui a présenté la première feuille de route pour l’année à venir.
La consultation a duré deux demi-journées. Elle a été organisée autour de cinq tables rondes thématiques consacrées à la transition énergétique, la biodiversité, la santé, la fiscalité et la gouvernance. Autour de chaque table ronde, il y avait des ministres, un facilitateur, des collèges de syndicats, d’employeurs, d’ONG environnementales de personnes morales, d’élus, de parlementaires et d’invités du gouvernement.
Ce mode de consultation a été critiqué par les absents comme le Comité 21, ou par ceux qui ont déploré, principalement, le peu de temps consacré pour traiter autant de sujets complexes sans préparation.
Pourtant, cette méthode affirme sa différence avec le Grenelle de l’environnement en organisant des réévaluations qui seront annuellement validées par des Conférences environnementales et qui souhaite fondamentalement, à la différence du quinquennat précédant, ne pas opposer l’économie à l’écologie.
La proposition politique
« Les défis ne se divisent pas, ils ne se hiérarchisent pas. Ils doivent être affrontés et surmontés ensemble. La crise écologique n’est pas une crise de plus. Elle s’inscrit dans la crise globale qui se décline sur le terrain économique, social et sanitaire. Il s’agit de mettre la France en capacité de porter un nouveau modèle de développement », déclarait le président en ouverture de la conférence.
Cette politique ambitieuse « veut faire de la France la nation de l’excellence environnementale » et se dit consciente de la gravité et de l’urgence, et considère l'enjeu transversal déclinable dans tous les ministères.
Les grands chantiers
La politique environnementale est traitée à travers 5 grands chantiers (présentés ici à travers quelques exemples).
Le premier chantier considéré comme prioritaire est celui de « la transition énergétique », qui repose sur un modèle de développement sobre et efficace en rupture avec le tout nucléaire et le tout pétrole en développant notamment le renouvelable et en améliorant par exemple les performances thermiques des bâtiments.
Par exemple, il faut considérer les annonces comme la clôture de la centrale nucléaire de Fessenheim en 2016, la réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité qui passera à 50 % à l’horizon 2025 et le rejet des demandes de permis d’exploration ou d’exploitation du gaz de schiste...
« La biodiversité » est le deuxième chantier. Il devrait s’articuler autour de la création d’une agence nationale de la biodiversité et d’un conseil national de la mer et du littoral.
S’agissant de l’agriculture, le gouvernement entend favoriser le développement de l’agriculture biologique ; maintenir le moratoire sur la mise en culture de semences OGM autorisées au niveau communautaire et interdire l’épandage aérien de produits phytosanitaires.
Le troisième dossier sera « la prévention des risques sanitaires environnementaux » où l’on envisage de soutenir l’effort de recherche, la protection des publics les plus sensibles et la diminution des inégalités environnementales (exposition aux zones polluantes).
Le quatrième chantier porte sur « la fiscalité écologique ». Une fiscalité que l’on veut plus juste socialement tout en favorisant l’innovation, la croissance économique et la compétitivité des entreprises.
Enfin, le dernier chantier est consacré à « la gouvernance environnementale ». Cette gouvernance, piloté par un Conseil de la transition écologique, souhaite la participation effective des citoyens aux décisions publiques et une simplification de notre droit de l’environnement.
L’accueil du projet
La présentation de ce programme de travail, qui doit être affiné, a reçu globalement un bon accueil de la part d’une grande partie des participants présents à la conférence. Mais, il a également soulevé de nombreuses interrogations dans le milieu des entreprises notamment celles qui ont dit ne pas se sentir suffisamment associées et consultées. Laurence Parisot, la présidente du Medef, a souligné la situation de crise et la nécessité de permettre la croissance même pour financer la décroissance.
Pour d’autre, qui n’opposent pas systématiquement l’écologie à l’économie, et qui avaient de fortes attentes, le rendez-vous est raté. Les engagements ne sont pas à la hauteur, ou pire, passent totalement à côté de ce qu’il faudrait.
Cette proposition politique du gouvernement ne fait pas l’unanimité. Elle propose une approche nouvelle, différente, dont l’expérimentation reste à faire et à traduire en acte sur le terrain.