Article régulièrement mis à jour avec agences et nos correspondants
► Les forces en présence : L'Arabie saoudite a mobilisé 150 000 militaires et 100 avions de combat, tandis que les Emirats arabes unis ont engagé 30 avions de combat, Bahreïn et Koweït 15 appareils chacun et le Qatar 10 (source : al-Arabiya)
► Les pays mobilisés : les pays membres du Conseil de coopération du Golfe (Oman excepté) + l'Egypte, la Jordanie, le Soudan, le Pakistan et le Maroc
L'opération militaire de la coalition menée par Riyad se poursuit ce soir, jeudi 26 mars, avec de nouvelles frappes aériennes qui ont visé la base militaire d'Al-Tarik, à proximité de Taëz, la troisième ville du pays, sur la route entre Sanaa et Aden, dans le Sud. Un porte-parole de la coalition a déclaré que les frappes allaient continuer jusqu'à ce que les « objectifs » soient atteints. Il a également précisé qu'il n'y avait pas de projet d'offensive terreste dans l'immédiat.
L'opération « Tempête de fermeté » a débuté par des frappes aériennes dans la nuit de mercredi à jeudi. Les bombardements ont visé des sites stratégiques tenus par la milice chiite des Houthis : une base aérienne, le palais présidentiel, le siège du bureau politique de la rébellion ainsi que l’aéroport international qui a été repris par les forces gouvernementales.
Les Houthis s'approchaient ces derniers jours d'Aden, la grande ville du Sud, et ils étaient en passe de contrôler le détroit de Bab el-Mandeb par où transitent des énormes quantités de pétrole par voie maritime à destination principalement de l'Occident. L'offensive étrangère au Yémen aurait fait au moins treize victimes, selon la Défense civile yéménite citée par l'AFP ce jeudi 26 mars au matin. Un quartier résidentiel de Sanaa a été notamment touché par les bombardements.
L'offensive annoncée des Etats-Unis
C’est lors d’une conférence de presse donnée à Washington que l’ambassadeur saoudien, Adel al-Jubeir, a annoncé l’offensive en cours au Yémen. Le fait est assez rare pour être souligné, pointe notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio.
« L'opération vise à défendre le gouvernement légitime » du président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, a déclaré le diplomate.
Les opérations se limitent à des frappes aériennes, mais d'autres forces militaires sont mobilisées et la coalition, qui implique, selon lui, dix Etats, « fera tout ce qu'il faudra », a ajouté M. Adel al-Jubeir. « Nous avons une situation où vous avez une milice qui contrôle ou pourrait contrôler des missiles balistiques, des armes lourdes et une force aérienne », a fait valoir l'ambassadeur saoudien.
L'opération a débuté mercredi à 23h00 TU, a-t-il précisé. Selon certaines sources, des avions de guerre auraient lancé tôt dans la nuit de jeudi une attaque contre l'aéroport de Sanaa. Des témoins et des sources militaires indiquent également que les raids aériens saoudiens ont visé des sites sensibles tenus par la rébellion chiite dans la capitale, dont la base aérienne al-Daïlami, dans le nord de la capitale, ainsi qu'un campement des forces spéciales. Selon ces mêmes sources, un incendie se serait déclaré dans le palais présidentiel.
Selon la chaîne de télévision Al Arabiya citée par Reuters, l'Arabie saoudite contribue à hauteur de 100 avions de guerre et de 150 000 soldats à l'opération militaire au Yémen. L'offensive réunit aussi des avions de l'Egypte, du Maroc, de Jordanie, du Soudan, du Koweït, des Emirats arabes unis, du Qatar et de Bahreïn, précise la chaîne.
Soutien des Etats-Unis « en logistique et en renseignement »
Dans un communiqué conjoint, publié par l'agence officielle de presse saoudienne, cinq Etats du Golfe déclarent avoir « décidé de répondre à la demande de Son Excellence Abd-Rabbou Mansour Hadi, président du Yémen, de protection du Yémen et de son cher peuple de l'agression des milices houthis. »
Informée de l'opération, la Maison Blanche a fait savoir dans un communiqué que les Etats-Unis l'approuvaient et allaient fournir un soutien « en logistique et en renseignement ». « Bien que les forces américaines n'agissent pas en direct sur le plan militaire au Yémen pour soutenir cet effort, nous sommes en train de mettre sur pied une cellule de planification commune avec l'Arabe saoudite », peut-on lire dans le communiqué de la présidence.Des responsables américains, cités par l'AFP, envisagent plus clairement de fournir à Riyad du ravitaillement en vol et des avions radars.
« Nous travaillons étroitement avec nos partenaires saoudiens », expliquait hier la porte parole du département d’Etat, ajoutant que Washington était en contact avec le président yéménite en fuite, rapporte notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio. Washington a évacué, le week-end dernier, tous ses personnels encore présents sur place, une centaine de diplomates et les hommes des forces spéciales qui se trouvaient toujours en territoire yéménite. L’Arabie saoudite, déclare l’ambassadeur aux Etats-Unis, s’est coordonnée avec Washington avant de lancer ces bombardements, et la Maison Blanche avait lancé des appels répétés à l’arrêt des combats ces derniers jours.
Des responsables américains avaient rapporté hier dans la journée que l'Arabie saoudite regroupait des troupes et du matériel militaire lourd, notamment de l'artillerie dans des zones situées près de sa frontière avec le Yémen.
Le Conseil de coopération du Golfe en soutien
Les pays du Conseil de coopération du Golfe, Oman excepté, soutiennent l'offensive, informe notre correspondante à Doha, Laxmi Lota. Le Qatar a signé le communiqué du Conseil de coopération du Golfe cette nuit : les pays du CCG ont décidé, peut-on lire, « de protéger le Yémen et son peuple face à l'agression de la milice [chiite] houthi ». On ne sait pas encore précisément de quelle manière le Qatar intervient. Les Emirats arabes unis ont, eux, envoyé 30 avions de combat.
L'option militaire a été prise « avec réticence », indiquait cette nuit l'ambassadeur saoudien à Washington. Le Qatar s'était dans un premier temps positionné en faveur du dialogue. Doha devait d’ailleurs accueillir la conférence de réconciliation inter-yéménite proposée par Riyad, mais aucune date n’avait été avancée pour cette réunion. Face à la dégradation continue de la situation au Yémen, les pays du Golfe ont finalement opté pour la force et la « fermeté ». Et pour ne pas être accusés d'ingérence, ils précisent dans leur communiqué que leurs appels au dialogue envers les chiites houthis sont restés sans réponse.
De son côté, les ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe ont décidé aujourd'hui même de mettre en place une force militaire conjointe, lors d'une réunion à Charm el-Cheikh en Egypte. L'objectif de cette force sera notamment de combattre les groupes terorristes. Le projet a donc été accéléré avec une intervention militaire arabe au Yémen, étant donné la nature de la situation dans le pays.
Mise en garde des Houthis contre une guerre dans la région
L'Egypte et la Jordanie ont confirmé officiellement ce jeudi matin leur participation à l'opération. L'Egypte devrait envoyer dans le Golfe d'Aden quatre navires de guerre pour protéger cette voie maritime stratégique. L'Egypte est un proche allié de l'Arabie saoudite et des Emirats arabes unis. Ces pays ont déjà effectué des manoeuvres militaires communes.
Selon une dépêche publiée par l'agence officielle saoudienne SPA, le Maroc, le Pakistan et le Soudan se sont également portés volontaires pour participer à l'opération. Plus concrètement, le Bahreïn et le Maroc vont fournir des avions de combat.
La réaction des miliciens houthis a été immédiate. Dans un entretien accordé à la chaîne al-Jazeera, cité par l'agence Reuters, Mohammed al-Boukhaiti, membre du bureau politique des Houthis, a déclaré qu'une « agression » était « en cours au Yémen ». « Nous y ferons face vaillamment », a-t-il déclaré, mettant également en garde contre une guerre dans la région.
Le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, qui s’était réfugié à Aden après la chute de Sanaa, avait dû quitter sa résidence sous la pression des attaques des rebelles houthis. Hier, mercredi 25 mars, les milices chiites houthis, ainsi que des forces alliées à ces milices, ont accentué la pression sur Aden. Ils se seraient emparés de l’aéroport international de la ville dans l'après-midi. Le président yéménite, de son côté, a finalement quitté le pays pour rejoindre l'Arabie saoudite, où il est arrivé aujourd'hui, jeudi.
La chaîne de télévision al-Hadath, propriété de l'Arabie saoudite, a annoncé que les navires étrangers avaient été priés de ne pas approcher des ports yéménites.