Avec notre correspondant à Beyrouth, Paul Khalifeh
L’assassinat de l’ancien ministre Mohammad Chatah a creusé le fossé entre les factions libanaises déjà profondément divisées sur la crise syrienne. Les chefs de la coalition antisyrienne du 14-Mars ont accusé Damas et ses alliés libanais d’être responsables de cet attentat.
Le Hezbollah s’est défendu en dénonçant « un crime odieux qui vise à semer le chaos au Liban et à saper l’unité nationale ». Dans un communiqué, le Hezbollah affirme que ce crime bénéficie aux seuls ennemis du Liban et appelle les Libanais à la sagesse face au danger qui guette leur pays.
Le leader chrétien Michel Aoun a volé au secours de son allié. Il a dit rejeter les accusations politiques et arbitraires qui ne font que jeter de l’huile sur le feu. « Si l’incendie éclate, personne ne sera épargné », a-t-il encore prévenu.
Un autre allié chrétien du Hezbollah a déclaré que l’assassinat de Mohammad Chatah vise à saper la paix civile. Le Liban est au bord de la discorde, et pour l’éviter, la classe politique doit faire preuve d’un sens de la solidarité. Le danger de la discorde sectaire a été aussi souligné par le président du Parlement, Nabih Berri. Ce haut dirigeant de la communauté chiite a estimé que l’assassinat est un crime qui veut faire du Liban une scène de règlements de comptes.
→ A (RE)LIRE : Liban: attentat à la voiture piégée devant le siège du Premier ministre
■ Analyse : une conséquence directe du conflit en Syrie
Georges Corm est un historien et politologue libanais :
« Le pays va probablement continuer d’être endeuillé tant qu’il y a une telle bataille régionale, notamment autour du dossier syrien qui échappe de très loin aux acteurs locaux et qui est devenu une bataille à l’échelle internationale.
Je ne pense pas que ce soient les factions internes libanaises qui font ça. On a déjà trouvé des connexions avec les combattants syriens… Il est très clair que ceux qui planifient ces attentats visent notamment à monter les uns contre les autres les membres de la communauté sunnite et ceux de la communauté chiite.
De toute façon, de par son histoire, le Liban est un État tampon. Il est aussi très souvent utilisé pour marquer des points sur la scène régionale. On a connu une déstabilisation atroce pendant quinze ans. Pour le moment, je pense que les institutions libanaises tiennent le coup, qu’elles vont continuer à tenir le coup. Je ne crois pas que la population ait envie de s’entre-égorger. »