La concomitance des opérations n’est en effet qu’un hasard du calendrier, d’après les bribes d’informations que les responsables américains laissent filtrer.
Concernant la Libye, Barack Obama a donné son feu vert pour cet engagement des troupes au sol, il avait été mis au courant régulièrement, et depuis des semaines, de la rapide accélération de la traque concernant Abou Anas al-Libi.
Abou Anas al-Libi a été enlevé à Tripoli samedi matin à l'aube. Il rentrait de la mosquée et était en train de se garer, quand des hommes cagoulés ont fait irruption. Selon un de ses proches, les assaillants ont brisé les vitres du véhicule et emmené l'homme. On sait aujourd'hui qu'il s'agissait des commandos d'élite de la marine, les Navy Seals.
Abou Anas al-Libi se trouverait désormais, selon un porte-parole du Pentagone, « en lieu sûr, à l'extérieur du territoire libyen ». Il pourrait être rapidement transféré aux Etats-Unis. L'homme âgé de 49 ans était recherché pour son rôle dans les attentats de 1998 contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. Le FBI avait même offert 5 millions de dollars pour sa capture.
L’embarras de Tripoli
Comment une telle opération a-t-elle pu réussir en plein centre de la capitale et si les Libyens ont été associés d'une manière ou d'une autre. Il n’y a pas de confirmation officielle de la version de Washington assurant que Tripoli a été prévenu de cette opération menée au centre de la capitale libyenne. Ce dimanche matin, en tout cas Tripoli a dénoncé un enlèvement et réclamé des explications à Washington. Tripoli rappelle aussi sa volonté de juger les ressortissants libyens sur son territoire, quel que soit le crime qu'ils ont commis. Une position de principe indispensable pour tenter d'apaiser tous ceux qui accusent le gouvernement d'être à la solde des Occidentaux.
Le fils d'Abou Anas al-Libi assure, lui, que l'enlèvement a été filmé, et qu'il y avait bien des Libyens dans le commando qui a capturé son père. Ce n'est pas contradictoire pour Patrick Haimzadeh*, expert des questions libyennes. Pour lui, cette affaire ne devrait qu'augmenter un peu plus le manque de légitimité du gouvernement.
Pour monter une telle opération sur la route de l’aéroport en zone urbaine et en plein jour, il a fallu avoir des complicités à l'intérieur du pays. Selon Patrick Haimzadeh, en Libye on peut trouver facilement des gens pour coopérer avec les Américains pour ce genre d'opération.
Un coup porté à l’Etat libyen ?
La capture d’Abou Anas al-Libi pourrait coûter cher au gouvernement libyen, accusé d'être à la solde des Occidentaux. Un gouvernement qui a certes dénoncé samedi un enlèvement mais qui n'a manifestement pas pu empêcher l'opération américaine.
« Cette atteinte à la souveraineté de l’Etat libyen ne fera que décrédibiliser l’équipe actuelle au pouvoir mais, comme toutes les autres affaires, ça devait se tasser assez rapidement et je ne pense pas que ça pourrait porter un coup fatal au gouvernement d’Ali Zidane », estime Patrick Haimzadeh.
Mogadiscio a coopéré avec Washington
En Somalie en revanche, le raid a manifestement été mené avec la bénédiction des autorités somaliennes. Les services de renseignements américains surveillent les Shebabs depuis des mois, mais l’opération semble avoir été accélérée après l’attaque contre le centre commercial de Nairobi.
Washington ne souhaite pas donner de détails sur les cibles visées, ni sur la réalisation ou non de l’objectif, mais confirme le retrait du commando, sans avoir fait aucun prisonnier, et sans avoir subi aucune perte.