C'est Jean-Marc Ayrault qui va jouer les démineurs en recevant à Matignon les présidents des assemblées, des commissions concernées par l'affaire syrienne (Défense et Affaires étrangères), et des groupes parlementaires. Car un vent de protestation souffle au sein de la classe politique française depuis que Barack Obama a annoncé son intention d'attendre un vote du Congrès américain avant d'engager une intervention en Syrie.
Une intervention déjà refusée il ya quelques jours par les parlementaires britanniques, au grand dam du Premier ministre David Cameron.
En France, aucune consultation des parlementaires n'est nécessaire pour que le président François Hollande puisse engager les forces militaires dans une opération extérieure. L'Elysée s'abrite d'ailleurs derrière l'article 35 de la Constitution selon lequel le gouvernement doit simplement informer la représentation nationale, pour justifier le choix d'organiser un débat sans vote mercredi prochain.
Cela n'empêche pas l'opposition de droite de faire pression sur François Hollande.Tous les ténors ont réclamé un vote : François Fillon, Jean-Louis Borloo, François Bayrou. Jean-François Copé demande lui au président de la République de recevoir les chefs de parti et de ne pas décider tout seul. L'UMP va d'ailleurs réunir son bureau politique mardi pour parler de la Syrie. A gauche aussi, la position du chef de l’Etat est critiquée notamment par Jean-Luc Mélenchon.
Le dossier syrien devient de plus en plus politique et François Hollande va devoir en tenir compte.
► La France avance ses preuves
Un jour après Washington et son rapport de quatre pages sur l'attaque chimique attribuée au régime syrien le 21 août dernier près de Damas, la France déclassifie aussi des documents révélant l'étendue de l'arsenal chimique syrien. Quatre pages aussi, établies par la Direction générale de la sécurité extérieure et la Direction du renseignement militaire destinées à être rendues publiques. Ce document très didactique sera remis aux parlementaires qui rencontrent ce lundi le Premier ministre Jean-Marc Ayrault pour parler de l'engagement français en Syrie.
Selon la synthèse des services, une production massive, diversifiée et tout à fait autonome depuis 30 ans a permis de stocker plus d'un millier de tonnes d'agents chimiques de guerre, essentiellement du gaz sarin.
Le document publié par le Journal du dimanche hier et authentifié par une source gouvernementale, estime que le 21 août dernier près de Damas, un usage « massif » d'agents chimiques a bien été fait. Autrement dit, après de précédentes attaques, de faible ampleur, un « changement d'échelle » a été décidé, pour tuer et « instaurer la terreur », selon le document. De quoi « légitimer » une intervention armée auprès d'une opinion publique encore réticente.