Egypte: pas d'apaisement en perspective après les violences de mercredi

Douloureux réveil pour les Egyptiens ce jeudi 15 août après les violences du mercredi. Selon un bilan officiel provisoire émanant du ministère de la Santé plus de 500 personnes ont été tuées dont 43 policiers. Le bilan serait dix fois plus selon les Frères musulmans qui évoquent un « massacre ». L'état d'urgence a été décrété et des généraux en retraite ont été nommés à la tête des 18 provinces alors que les Frères musulmans appellent à de nouveux rassemblements ce jeudi.

Avec nos correspondants au Caire, Perrine Mouterde et Alexandre Buccianti

Le Premier ministre Hazem el-Beblaoui est catégorique : les autorités ont tout essayé avant de faire intervenir la police, mais l'intransigeance et l'obstination des Frères musulmans ont mené à la violence. Le Premier ministre a salué la police pour sa très grande retenue et le ministre de l'Intérieur tient le même discours. Il a justifié l’intervention musclée des forces de l’ordre, par le fait, selon lui, que les manifestants ont tiré dès la première somation.

Le général de police, Mohamed Ibrahim a estimé que ces troupes avaient même fait preuve de retenue et il en veut pour preuve la mort de 43 de ses hommes, le bilan le plus lourd en une journée, depuis le massacre d’une centaine de policiers par des islamistes, en 1981.

Le ministre a tout de même regretté de ne pas avoir réussi à arrêter les hauts responsables Frères musulmans, qui avaient été vus au sit-in de Rabaa al-Adawiya, avant que la police n’en prenne le contrôle. Et il a conclu son intervention télévisé en indiquant que les forces de l’ordre ne permettront pas la constitution de nouveaux sit-in, quel qu’en soit le coût.

La démission de Mohamed el-Baradei critiquée

Mohamed el-Baradei était une figure du gouvernement, une caution libérale aussi pour la communauté internationale. Sa démission marque une première rupture au sein de ce cabinet chargé de mener la transition. Mais sa démission marque surtout la victoire des partisans de la méthode forte au sein du cabinet. La décision de Baradei a été largement critiquée. Beaucoup, dont par exemple les militants du mouvement Tamarod, considèrent qu’il abandonne le peuple dans un moment historique. Aucun autre ministre n’a d'ailleurs proposé de démissionner et le chef du gouvernement a pleinement justifié l’assaut de l’armée. L’instauration de l’état d’urgence marque aussi le retour en force de l’armée et de la police, salué et apprécié par une grande partie des Egyptiens.

Les Frères musulmans appellent quand même à manifester, malgré l’état d’urgence et le couvre-feu, décrété dans près de la moitié des provinces du pays, dont le Caire et Alexandrie

La confrérie des Frères musulmans n’a pas vraiment le choix. L’heure de la négociation est passée et les militants ne vont pas accepter une accalmie maintenant, surtout après que la confrérie leur a dit qu’il y avait eu 2 200 martyrs qui étaient tombés.

Et ces manifestations, qui sont accompagnées d’attaques sur des édifices publics et sur les églises et les chrétiens, sont une lame à double tranchant. Les Egyptiens, dans leur majorité, sont fatigués par les désordres et l’insécurité qui règnent depuis trois ans. Et les plus défavorisés, qui eux souffrent de l’effondrement de l’économie, n’espèrent qu’une seule chose, que la machine reprenne.

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