Le rassemblement le plus important devait avoir lieu après la prière du soir à 22 heures, autour de la mosquée de Rabaa. Mais d’autres manifestations se sont déroulées dans la journée, à proximité notamment de la préfecture de police de Gizeh, non loin du Caire, ou encore devant le ministère de la Défense et devant l’ambassade d’Arabie saoudite, un pays accusé par les pro-Morsi de soutenir le régime de transition.
En tête du cortège, des femmes portant des portraits de Mohamed Morsi, mais aussi des cercueils symbolisant les violences de ces derniers jours. Leur objectif : dénoncer le soutien apporté au général Sissi par certains pays arabes comme l’Arabie saoudite, mais aussi par l’Europe et les Etats-Unis.
« Ces pays doivent boycotter ce gouvernement »
« Je suis en colère parce que je pensais que ces pays allaient soutenir la liberté et les droits de l’homme, s'indigne une manifestante. Mais ils n’ont même pas condamné la violence et les centaines de victimes qu’il y a eu ces derniers jours. Ce que je demande, c’est que ces pays boycottent ce gouvernement issu d’un coup d’Etat militaire. Le gouvernement de Morsi, lui, était issu des élections, argumente-t-elle encore. Les pays qui défendent la démocratie, les droits de l’homme et la liberté devraient au moins respecter notre vote. »
Pour les manifestants pro-Morsi, les Etats-Unis et les pays européens devraient condamner sans attendre l’intervention de l’armée et réclamer le retour de Mohamed Morsi au pouvoir, faute de quoi tous leurs efforts de médiation resteront vains.
Sans aller jusque-là, la France a cependant appelé, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, à la libération des prisonniers politiques en Egypte, y compris celle de Mohamed Morsi. La France juge la situation en Egypte « très critique ». Un cinquième soldat égyptien a été tué ce mardi dans le Sinaï.
Mohamed Morsi va bien
Depuis sa destitution le 3 juillet dernier, l'ancien président islamiste est toujours en résidence surveillée dans un lieu tenu secret. En visite au Caire, la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a finalement obtenu de l'armée de pouvoir le rencontrer la nuit dernière. Selon elle, Mohamed Morsi va bien et a accès aux informations. La chef de la diplomatie européenne est la seule personne à lui avoir officiellement rendue visite.
Même la famille de l'ex-président n'a pu le voir. Et le lieu de sa détention est toujours tenu secret - pour sa sécurité, assurent les militaires. Mais depuis la semaine dernière, la justice a clarifié la situation juridique de M. Morsi. Il est en détention provisoire pour quinze jours. Il pourrait être transféré à la prison de Tora, dans la banlieue du Caire, là où est incarcéré l'ancien Raïs Hosni Moubarak.
« Vengeance de l'ancien régime »
Un tribunal du Caire l'accuse de liens présumés avec le Hamas palestinien lors d'attaques contre la police sous Moubarak, ainsi que d'évasion de prison début 2011. Le parquet enquête sur cette évasion mais examine aussi des plaintes de particuliers contre M. Morsi pour « espionnage », « incitation au meurtre de manifestants » et « mauvaise gestion économique ».
Des accusations que ses partisans qualifient de « vengeance de l'ancien régime ». Le système judiciaire égyptien permet de prolonger la détention provisoire de l'ex-président jusqu'à six mois. C'est ce qui était arrivé à l'ancien président déchu Hosni Moubarak en 2011, avant son procès.
En s'entretenant près de deux heures avec M. Morsi, Catherine Ashton a montré aux Frères musulmans qu'elle établissait le contact avec tous les camps. A Bruxelles, son porte-parole Michael Mann a évoqué les leviers d'action dont dispose l'UE, y compris des leviers financiers. « Nous avons un système de partenariat et d'autres instruments financiers qui sont conditionnels », prévient-il. L'aide financière à l'Egypte s'est globalement élevée à 450 millions d'euros pour la période 2011-2013.