Meeting de masse d'un côté, affrontements de l'autre: le bras de fer continue en Turquie

L'Allemagne a demandé ce dimanche 16 juin au gouvernement turc de respecter la liberté de manifestation. De son côté, le Premier ministre Erdogan, en meeting à Istanbul, a déclaré qu'il était de son « devoir » de « nettoyer » la place Taksim. Samedi dans la soirée, la police est intervenue contre le bastion des manifestants d'Istanbul, qui réclament sa démission. Mais les opposants ne désarment pas.

Avec notre envoyé spécial à Istanbul et notre correspondant à Istanbul

La place Taksim vidée. Le parc Gezi nettoyé. Les autorités ont même replanté des arbres et des fleurs, comme s'il ne s'était jamais rien passé. La vitesse à laquelle tout cela s'est déroulé rappelle la dextérité avec laquelle les forces de l'ordre ont délogé les manifestants du parc samedi soir.

Mais rien n'y fait ! L'intervention de la police a galvanisé les esprits des contestataires. Ce dimanche, toute la journée, des affrontements ont eu lieu un peu partout dans les quartiers qui entourent la place.

Si les manifestants semblaient prêts, samedi, à baisser le ton avant l'intervention, désormais les esprits sont échaudés, et la résistance s'organise, à l'image des supporters de Besiktas, l'un des trois principaux clubs de foot d'Istanbul, dont le groupe « Carsi » est désormais officiellement partie prenante du mouvement de contestation (leur présence dans les violences d'il y a deux semaines avait déjà été remarquée).

La nuit stambouliote risque d'être longue et tendue, peut-être encore plus que la précédente. Les effectifs des forces de l'ordre ont été multipliés ces dernières heures, avec l'aide de la gendarmerie et des partisans de l'AKP, le parti au pouvoir, venus prêter main forte à la police.

De son côté, comme prévu, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a tenu son meeting à une dizaine de kilomètres de là. Il a réaffirmé son intention de déraciner une centaine d'arbres du parc Gezi.

M. Erdogan est toujours aussi droit dans ses bottes, plus que jamais sûr de son infaillibilité et de son bon droit. En meeting, il a conforté son incontestable popularité devant quelques centaines de milliers de supporters. Confiant et même défiant, le président du parti au pouvoir n’a pas fait un demi-pas en arrière, même s’il s’est abstenu de parler, cette fois, du projet de réhabilitation du parc Gezi.

Le Premier ministre n’a pas manqué de répéter ses nombreuses attaques contre les manifestants de la place Taksim et du parc Gezi : des « terroristes », des « vandales », des « membres d’organisations illégales ». Contre eux, a-t-il insisté, une seule méthode : la répression, dont il se félicite sans ambages. Mieux encore, Recep Tayyip Erdogan a promis de mener à leur terme des enquêtes contre tous ceux qui ont fait ce qu’il appelle de la provocation : internautes, artistes, agents étrangers, enseignants.

« Ils rendront tous des comptes », a-t-il annoncé. « On a tout nettoyé et on va continuer », s’est-il félicité après les dernières opérations de police. En bon leader populiste, le chef du gouvernement n’a pas manqué d’attaquer au passage les lobbyistes de la finance internationale, les grands groupes de presse étrangers et l’Union européenne.

M. Erdogan s’en remet maintenant à sa base. « Vous avez fait 50% aux dernières législatives. En 2014, vous allez faire exploser les urnes, Inch’Allah ! »

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