De notre correspondant à Beyrouth,
La démission de Najib Mikati a surpris aussi bien ses alliés au sein du gouvernement que ses adversaires de l'opposition. Le Premier ministre a annoncé son départ peu après une réunion houleuse du gouvernement, vendredi soir, où il a été mis en échec par une coalition formée des ministres chiites du Mouvement Amal et du Hezbollah, et chrétiens du parti du général Michel Aoun.
Ce bloc de ministres a voté contre deux propositions présentées par Najib Mikati et le président de la République Michel Sleimane. La première porte sur la nomination des membres de la Commission de supervision des élections législatives, ce qui entrave la tenue du scrutin à la date prévue, en juin. La deuxième concerne la prorogation du mandat du chef des Forces de sécurité intérieure, le général Achraf Rifi, qui prend sa retraite le 1er avril. Cet important service de sécurité risque ainsi de se retrouver sans chef, dans un contexte sécuritaire instable et délicat.
Najib Mikati a annoncé qu'il démissionnait pour permettre la formation d'un gouvernement de salut national. Un vœu pieux, qu'il est très difficile de concrétiser dans les circonstances politiques que traverse le Liban en ce moment. En effet, la démission du Premier ministre intervient dans un contexte délicat sur tous les plans. Majorité et opposition ne parviennent pas à s'entendre sur une nouvelle loi électorale, malgré des semaines de négociations ardues. Ce désaccord pourrait provoquer le report du scrutin et créer un vide au niveau du pouvoir législatif.
Le Liban rattrapé par la crise syrienne
Sur le plan sécuritaire, le Liban vit au rythme de la crise syrienne qui a depuis longtemps traversé la frontière. La présence d'un million de Syriens, soit le quart de la population, provoque des tensions et une forte pression économique. Très divisés sur la crise en Syrie, les Libanais ne parviennent plus à maintenir leur différend dans le cadre politique. Les incidents violents, accompagnés de fortes tensions sectaires entre sunnites et chiites, se multiplient. Dans le ville de Tripoli, au nord du Liban, ils dégénèrent souvent en affrontements armés, qui ont encore fait ces deux derniers jours une trentaine de morts et de blessés.
En l'absence d'accord entre les protagonistes, la formation d'un nouveau gouvernement pourrait s'avérer difficile, voire impossible. Le Liban se retrouvera alors sans pouvoir exécutif et, dans quelques semaines, sans Parlement. Tout simplement, sans institutions.