Avec notre correspondant à Jérusalem, Nicolas Falez
Les raids se poursuivent et parallèlement, l’aviation israélienne a lâché ces dernières heures des milliers de tracts sur la bande de Gaza. Des messages en arabe qui demandent aux civils de se tenir à distance du Hamas et de ses infrastructures dans la bande de Gaza.
Le Hamas est bien la cible de cette offensive israélienne. Trois combattants du mouvement ont été tués ce jeudi matin lors d’un raid israélien dans le secteur de Khan Younès, ce qui porte à 15 au moins le nombre de victimes palestiniennes depuis mercredi, parmi lesquelles plusieurs enfants.
Parallèlement, les tirs de roquettes palestiniennes s’intensifient ce jeudi sur le sud d’Israël. Pour la première fois, l'une d'elles a explosé à 15 km au sud-est de Tel-Aviv sans faire de blessé ni de dégât majeur. Les sirènes ont retenti à de nombreuses reprises à Beersheva, à Ashkelon notamment, indiquant à la population qu’elle dispose de quelques dizaines de secondes seulement pour se mettre aux abris. Plusieurs roquettes se sont abattues sur des maisons ou des bâtiments publics ces dernières heures. On dénombre au moins 16 blessés.
La communauté internationale divisée
Après le déclenchement de l'opération israélienne, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni ce mercredi soir. « Cette attaque israélienne à Gaza est un moyen de détourner l'attention portée sur nos efforts pour obtenir le 29 novembre prochain la reconnaissance du statut d'observateur pour notre Etat par l'Assemblée générale. C'est un pas très important dans la lutte du peuple palestinien », a déclaré l'ambassadeur palestinien à l'ONU. « Peut-être devrait-on changer le nom d'Etat non membre par celui d'Etat terroriste non membre ? Si le Hamas, qui est une organisation terroriste, fait partie de cet Etat, nous allons dans la mauvaise direction », a répliqué l'ambassadeur israélien.
Autre réaction, celle du président égyptien Mohamed Morsi, proche du mouvement islamiste palestinien et de la mouvance des Frères musulmans. Premier chef d'Etat à réagir, il a jugé inacceptable l'« agression » israélienne contre la bande de Gaza. Selon le gouvernement du Hamas, le Premier ministre Hicham Qandil va se rendre dans la bande de Gaza ce vendredi, en compagnie de plusieurs de ses ministres. Une visite saluée par le mouvement islamiste.
Autre son de cloche : Londres et Washington soutiennent le droit d’Israël à se défendre, même si les deux capitales ont appelé chaque partie à la retenue. Le président américain Barack Obama s’était entretenu avec le Premier ministre israélien, dès mercredi soir, enjoignant ce dernier à faire « tous les efforts possibles pour éviter des victimes civiles ».
Le chef de la diplomatie britannique William Hague a été lui très vindicatif à l’endroit du Hamas, l’accusant d’être « le principal responsable de la crise actuelle à Gaza ».
La situation au Proche-Orient a aussi été commentée par la diplomatie russe, qui exprime son inquiétude, condamne les violences du Hamas envers les civils israéliens, tout en appelant les Israéliens à la retenue.
La France, elle, ne veut pas désigner de responsable et appelle à l'apaisement, se disant « extrêmement préoccupée » par la situation sur le terrain.
Pourquoi maintenant ?
Après l’opération « Plomb durci » menée par Israël à l’hiver 2008-2009, un calme très relatif a régné autour de la bande de Gaza. Une trêve de fait, durant laquelle le Hamas freinait les groupes armés qui tiraient des roquettes. Mais ce statu quo fragile était régulièrement rompu par des poussées de violence. Récemment, les dirigeants israéliens ont estimé que la dissuasion imposée après « Plomb durci » s’était effritée. Une recrudescence d’attaques contre des soldats israéliens patrouillant autour de la bande de Gaza a notamment été observée.
Du point de vue israélien, il était donc devenu inacceptable que le Hamas remette en cause le fragile équilibre. Le Hamas, de son côté, s’estime renforcé politiquement dans la région avec l’arrivée au pouvoir des islamistes dans plusieurs pays, dont l’Egypte. Par ailleurs, la récente visite très remarquée de l’émir du Qatar à Gaza a été largement interprétée comme un soutien politique au Hamas.
Parmi les raisons qui ont incité Israël à agir, il y a aussi le calendrier électoral, avec des législatives prévues en janvier. Pour le gouvernement, il est impensable d’apparaître inactif face aux tirs de roquettes qui visent les habitants du sud d’Israël. L’opération « Pomb durci » il y a quatre ans s’était elle aussi déroulée pendant une campagne électorale en Israël.