Elucidera-t-on un jour le mystère qui entoure la mort suspecte de Yasser Arafat, disparu il y a huit ans ? C’est la question qu’ont dû se poser les Palestiniens en apprenant que les travaux pour l’exhumation du corps de leur leader historique, disparu il y a huit ans, avaient commencé. Les premiers coups de marteaux ont en effet résonné ce mardi matin dans le mausolée d’Arafat en Cisjordanie. Les opérations vont se poursuivre « au moins 15 jours » selon les observateurs, en vue de la réalisation de prélèvements sur la dépouille, en présence d’enquêteurs français, suisses et russes.
Rumeurs et dénégations
Les rumeurs sur les causes de la mort de Yasser Arafat ont commencé dès l’annonce de sa mort, survenue en France le 11 novembre 2004. Tombé sérieusement malade en octobre dans son quartier général de Ramallah, en territoire palestinien, le vieux chef de l’OLP avait été évacué en urgence vers un hôpital militaire en France. Les médecins français qui s’étaient alors relayés à son chevet n’avaient pas réussi à expliquer la raison exacte de la détérioration soudaine de la santé de leur patient, alimentant les rumeurs d’empoisonnement. Selon un sondage réalisé à l’époque, plus de 80% de Palestiniens estimaient que leur leader avait été assassiné par le Mossad et réclamaient la divulgation de son dossier médical. Rendu public ultérieurement, le dossier contredit la thèse de la mort par empoissonnement. Israël, pour sa part, a toujours nié toute responsabilité dans la mort du chef palestinien.
Les spéculations sur l’assassinat d’Arafat ont été relancées suite à la diffusion d’un documentaire il y a quelques mois par al-Jazeera consacré à la mort de l’ancien dirigeant de l’OLP. Dans le cadre de leur enquête sur le sujet, les journalistes de la chaîne qatarienne avaient réussi à mettre la main sur les derniers effets personnels d’Arafat. Ils les ont soumis à des analyses toxicologiques. Effectués par un laboratoire suisse, ces examens ont révélé des traces de polonium qui est une substance radioactive hautement toxique. Le polonium a notamment servi à l’empoisonnement en 2006 à Londres de l’opposant russe exilé Alexandre Litvinenko.
C’est suite à cette enquête d’al-Jazeera que la veuve d’Arafat, exilée à Paris, a saisi la justice française, réclamant qu’une enquête soit ouverte pour déterminer les causes exactes de la mort de son mari. Paris a répondu favorablement à cette demande et a dépêché des juges à Ramallah pour instruire le dossier et effectuer des prélèvements d’échantillons biologiques.
Une élite palestinienne fragilisée
Les actuels leaders de l’Autorité palestinienne qui entretiennent des relations compliquées avec Souha Arafat, ont dans un premier temps critiqué la démarche de celle-ci. Cette dernière ne les avait-elle pas accusés en 2004 de vouloir hériter du pouvoir rapidement en tentant d’enterrer leur chef vivant ? L’accusation qui visait notamment l’actuel chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas avait fait scandale à l’époque. Abbas a toutefois fini par donner son accord pour l’exhumation du corps d’Arafat, tout en s’assurant de son côté que des experts internationaux de son choix (des Suisses et des Russes ) seront présents lors de la réalisation des prélèvements, prévue le 26 novembre.