Avec nos correspondants et envoyés spéciaux au Caire
Dans le bureau de vote du quartier de Dokki au Caire, un quartier de classe moyenne, seule une vingtaine de personnes est en train de faire la queue à l’extérieur ce samedi 16 juin.
Au premier tour, il y avait beaucoup plus de monde dès 6h30 du matin. Mais fin mai, les gens allaient voter avant d’aller travailler alors qu’aujourd’hui, les Egyptiens ne travaillent pas et ont donc toute la journée pour se déplacer. En outre, la journée du dimanche 17 juin a été offerte exceptionnellement par les autorités à la population afin qu'elle puisse accomplir son devoir électoral.
« Rabena yostor », « Que Dieu nous garde ». L'expression revient dans la bouche de la plupart des Egyptiens et reflète leur préoccupation avant ce deuxième tour. Ils ont l’impression d’être à la veille d’une grande bataille qui pourrait ne pas être seulement électorale.
En effet, les Frères musulmans qui viennent de perdre l’Assemblée dissoute par la Haute cour constitutionnelle, ont durci le ton. Ils ont multiplié les déclarations promettant la révolution en cas de victoire du général Ahmed Chafik, le dernier Premier ministre de Moubarak. Certains ont même précisé que cette révolution sera « moins pacifique » que celle qui a renversé l’ancien raïs.
Parallèlement, les militaires ont accru leurs pouvoirs à la veille des élections. La police militaire a dorénavant les mêmes prérogatives que la police civile. Les bérets rouges procèdent à des contrôles d’identité et montent des barrages routiers. L’annonce par le Conseil suprême des forces armées qu’il soutiendra le président élu et qu’il réagira énergiquement à la violence n’a pas rassuré, au contraire.
Deux hommes en lice pour la destinée de l'Egypte
Mohamed Morsi est le candidat des Frères musulmans et Ahmed Chafik, un ancien du régime de Hosni Moubarak. Les deux hommes sont arrivés au coude-à-coude au premier tour, avec respectivement 24 et 23% des suffrages.
Mohamed Morsi, un homme peu charismatique, a cependant la machine des Frères musulmans derrière lui. Il se pose en défenseur des idées de la Révolution, mais il a aussi beaucoup de détracteurs qui estiment que les Frères musulmans, qui étaient au Parlement jusqu’ici, n’ont rien fait pour eux.
Puis Ahmed Chafik, l’ancien du régime (ancien commandant en chef de l'armée de l'air égyptienne et dernier Premier ministre de Hosni Moubarak), a proposé de restaurer la sécurité et l’économie du pays. Mais lui est décrié par les révolutionnaires qui ne veulent pas revenir en arrière. Il est vu aussi comme un candidat de l’armée. Hier encore, il y avait une manifestation au Caire pour protester contre Ahmed Chafik et contre l’armée. Et beaucoup de gens ont dit qu’ils n’iraient pas voter ce samedi.
C’est donc l’incertitude sur le taux de participation. La majorité de population ne sait pas trop pour qui voter. La principale préoccupation, c’est tout simplement de manger en Egypte. Le scrutin est donc très ouvert. Il faut savoir aussi que les Egyptiens vont voter pour un président dont ils ne connaissent pas les pouvoirs puisque la Constitution a été suspendue. Il est donc très difficile de savoir aujourd’hui quelle sera l’issue de ce scrutin présidentiel en Egypte.