Le détroit d'Ormuz, au cœur des enjeux géopétroliers

Reliant le golfe Persique à la mer d’Oman, le détroit d’Ormuz est l’un des corridors les plus stratégiques de la planète : près de 40% du trafic maritime pétrolier mondial y transite. Pas étonnant qu’il cristallise un certain nombre de crispations diplomatiques, alors que l’Iran est accusé par l’Agence internationale de l'énergie atomique de vouloir se doter de l’arme nucléaire.

Au nord, l’Iran, au sud, les Emirats arabes unis et le sultanat d’Oman : le détroit d’Ormuz, long de 63 km et large de 40 km, constitue une voie commerciale essentielle du trafic international, et surtout du trafic maritime pétrolier. « C’est le seul détroit qui soit une voie unique de sortie pour l’exportation par voie maritime du pétrole saoudien, iranien, et des émirats, soit plus du quart de la production mondiale et, surtout, un huitième du brut utilisé aux Etats-Unis, un quart de celui utilisé en Europe et un tiers de celui utilisé au Japon », explique le professeur Alain Nonjon sur le site diploweb.com.

Si le détroit d’Ormuz est devenu si stratégique, c’est aussi parce que les autres passages pour faire transiter le pétrole sont rares. « Il y a un oléoduc saoudien qui va vers la mer Rouge, et un oléoduc aboudhabien qui va vers l’océan Indien en contournant Ormuz », explique Pierre Terzian, directeur de la lettre Pétrostratégie.
 

Le couloir maritime a donc un rôle clé, qui explique pourquoi l’Iran tient tant à montrer au reste du monde son emprise sur lui : « Fermer le détroit est très facile pour les forces armées iraniennes, c'est comme boire un verre d'eau, comme on dit en persan », a déclaré mercredi 28 décembre l’amiral Habibollah Sayyari à la télévision en langue anglaise Press TV. Une déclaration qui a provoqué un tollé mondial, faisant grimper le cours du pétrole sur les marchés.

Pourtant, le détroit est une zone de transit international que tous les pays peuvent emprunter, conformément à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, a rappelé le ministère des Affaires étrangères français. L’Iran n’y exerce pas de droit particulier, même si elle s’est assurée un arsenal militaire important dans les îles de Tomb et Abou Masa, ainsi que dans le port militaire de Bandar Abbas.

Quatrième exportateur de pétrole

L’Iran peut-elle vraiment faire fermer le détroit d’Ormuz ? Il semble qu’en réalité, elle n’y ait pas grand intérêt. D’abord Pierre Terzian rappelle que la République islamique « a un besoin vital du détroit. » Lorsqu’on est le quatrième exportateur mondial de pétrole, un embargo pourrait vite mettre en danger l’économie du pays : « Les revenus des Iraniens dépendent à 95% du pétrole. Ils y réfléchiront donc à deux fois avant de le fermer définitivement. »

Enfin, il n’est pas sûr que l’Iran, malgré ses manœuvres navales des derniers jours et ses tentatives de faire monter la pression, puisse rivaliser avec les Etats-Unis. « Il ne faudrait pas plus de quelques heures aux Etats-Unis pour débloquer le détroit tout en anéantissant l’armée iranienne », explique Bernard Hourcade, spécialiste de l'Iran, sur France 24. Pour preuve, la déclaration d’un porte-parole américain du Pentagone, George Little : « Aucune perturbation du trafic maritime dans le détroit d'Ormuz ne sera tolérée ». Sans équivoque.

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