De notre correspondant à Jérusalem
« J’ai accompli ma mission », a dit le chef du gouvernement israélien, immédiatement après avoir accueilli Gilad Shalit sur la base aérienne de Tel Nof, là où le jeune soldat a également retrouvé sa famille.
C’est sûr qu’avec cette décision, Benyamin Netanyahu contredit tous ceux (et ils sont nombreux) qui l’accusent depuis le début de son mandat de manque de leadership, de « courage politique » en français. On lui a fait ce reproche à propos des négociations israélo-palestiniennes bloquées, on lui a fait ce reproche à propos du mouvement social sans précédent de l’été dernier en Israël.
Là, Benyamin Netanyahu a accepté de payer le prix : 1 027 Palestiniens libérés dont certains condamnés à de très lourdes peines pour avoir commis des attentats meurtriers. Huit Israéliens sur 10 soutiennent cet échange. 26 ministres sur 30 l’ont approuvé contre seulement 3 lors du vote au sein du gouvernement. L’opinion semble lui donner raison. Il faut dire qu’on touche ici du doigt un point très sensible de la société israélienne où les hommes passent 3 ans à l’armée et les femmes 2 ans. Et tout le monde estime ici que l’Etat doit faire son possible pour ramener les soldats à la maison. En cela, l’échange qui a permis la libération de Gilad Shalit est loin d’être une première.
Le Hamas s’est replacé sur le devant de la scène
Du côté des Palestiniens, l'opération remet le Hamas au premier plan, aux dépens de Mahmoud Abbas et de l'Autorité palestinienne. Le Hamas apporte la démonstration par A+B que l’enlèvement de soldats israéliens est un moyen efficace pour libérer des détenus palestiniens. Le mouvement espère un gain politique avec cette opération alors qu’il semblait marginalisé par les démarches de l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas à l’ONU.
Il faut toutefois relativiser ce succès du Hamas. D’abord, il n’a plus de soldat israélien à échanger. Ensuite le Hamas est actuellement dans une position inconfortable : son alliance avec le régime de Bachar el-Assad devient très encombrante pour le mouvement islamiste. C’est peut-être une des raisons qui l’a poussé à faire preuve de souplesse et à accepter la formule de l’échange de prisonniers.
Espoir d’une relance des négociations de paix
Les tous premiers mots de Gilad Shalit ont été pour dire son espoir d'une relance des discussions de paix entre Israéliens et Palestiniens. « Je veux croire, que cela va permettre la relance des discussions », entre Israéliens et Palestiniens, a dit Nicolas Sarkozy. Le Premier ministre britannique David Cameron a parlé d’un pas de plus vers la paix.
Cet échange peut changer l’atmosphère et contribuer à une poursuite de l’allègement du blocus de Gaza et consacrer le rôle d’intermédiaire de l’Egypte de l’après-Moubarak.
Mais sur le fond, l’équation politique, elle, ne change pas. L’Autorité palestinienne refuse de négocier avec Israël si la colonisation se poursuit. L’Etat hébreu refuse un nouveau gel de la colonisation. L’Autorité palestinienne et le Hamas sont réconciliés sur le papier mais sans avoir pu appliquer leur accord et sans s’être entendus sur le nom d’un Premier ministre.