Syrie: l’opposition de l’intérieur réclame une Conférence nationale

Le mouvement de protestation sociale initié à Deraa le 15 mars dernier et qui rassemble largement la jeunesse syrienne s’est organisé en comités de coordination ancrés dans les principales villes du pays et fédérés à l’échelon national. Ils viennent de s’entendre sur un programme de transition politique avec l’opposition laïque et religieuse jusqu’ici étouffée par le régime.

La jeunesse syrienne reste en première ligne face à la répression sanglante du régime mais elle vient de franchir une étape dans l’action en passant de la simple récitation de slogans à la rédaction d’un véritable programme politique. Et sur ce terrain, elle peut compter sur l'appui de l'opposition politique traditionnelle. Et en particulier sur les militants politiques, laïcs ou partisans d'un islam politique, déjà partenaires en 2001 de la Déclaration de Damas avec laquelle ils avaient lancé en vain un appel au changement démocratique à Bachar el-Assad, le jeune ophtalmologue qui succédait alors à Hafez el-Assad, son général de père. Toutes couleurs politiques confondues, habitués des prisons sinon de l’exil, beaucoup se sont agrégés dans cette nouvelle opposition de l'intérieur qui s’est organisée dans les principales villes de Syrie en comités de coordination.

Programme de transition

Le 11 juin, le Comité national de coordination est parvenu à un consensus entre toutes ces composantes de l’opposition autour d’une plateforme politique intitulé « La vision des comités de coordination pour l’avenir politique de la Syrie » qui constitue un véritable programme de sortie de la crise qu’ils analysent comme politique, économique et sécuritaire. Avec les jeunes en quête de changement pour avant-garde, de vieux routiers de la politique ont concocté non seulement un cahier de revendications mais surtout un agenda du changement. Ils le veulent radical mais surtout pas menaçant pour l’unité de la mosaïque communautaire syrienne.

Ce n'est pas un dialogue que propose cette opposition de l’intérieur, surtout pas le genre de dialogue recherché avec des obligés par le régime aux abois. C’est un programme de transition qu'ils voudraient négocier dans le cadre d'un Congrès ou d'une Conférence nationale, une concertation politique élargie, si possible, à des représentants du régime. L'objectif serait de former un Conseil de transition composé de civils et de militaires, le temps de préparer l’avènement d’un régime démocratique en chargeant notamment une Assemblée constituante de rédiger une nouvelle Constitution.

Le Comité national de coordination évalue à six mois la durée probable de cette transition. Mais d'abord, il exige la restauration de la liberté d'expression et d'organisation politique et, en même temps, la dissolution des organes sécuritaires et des « shabiha » qui servent de garde prétorienne au pouvoir. L'armée pourrait se charger très provisoirement d'assurer la sécurité. Quand au pilier politique du pouvoir, le parti Baas, il devrait renoncer à son monopole sur l'Etat pour redevenir un parti comme les autres. L'objectif est d'en finir avec le régime el-Assad tout en évitant les représailles et les affrontements communautaires.

Défendre l’unité du pays

Pour le moment, le Comité national de coordination reste discret sur l’identité de ses membres et de ses sympathisants politiques, répression oblige. Et comme en témoignent les arrestations opérées par le régime dans les rangs des partis traditionnels ou des organisations des droits de l’homme, Damas prend leur contribution au sérieux. La clandestinité n’entame cependant en rien leur volonté d’un changement qui évite le vide politique ou le chaos promis par le régime. Une menace qui tient d’ailleurs à l’écart de l’opposition certaines communautés échaudées ou au contraire séduites par l’histoire régionale, celle des chrétiens ou des Kurdes en Irak par exemple. L’objectif est, dans tous les cas, de défendre l’unité de la Syrie.


                                                                        

 

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