Comment l’armée israélienne prépare septembre 2011

Si les Palestiniens ne changent pas de cap, ils demanderont cette année à l’ONU de reconnaître leur Etat indépendant dans les frontières d’avant la guerre des Six-Jours en 1967. Une démarche internationale non négociée avec Israël, ce qui inquiète et irrite l’Etat hébreu. L’armée israélienne se prépare à toutes les éventualités.

« A propos de septembre (2011), nous avons plus de questions que de réponses », admet cet officier israélien de haut rang qui nous accueille dans une vaste base de l’armée, en Cisjordanie. Assis derrière son bureau, ce haut gradé nous explique que le projet palestinien de demander la reconnaissance internationale d’un Etat indépendant peut créer d’énormes attentes. « Comment ces attentes vont-elles se traduire sur le terrain ? », s’interroge le militaire.

Notre interlocuteur confirme l’information dévoilée par la presse de son pays à l’automne 2010 : le nombre de soldats israéliens actuellement déployés en Cisjordanie est le plus bas depuis deux décennies. Le chiffre exact n’est pas public, « quelques centaines d’hommes », nous dit l’officier. Pas plus, car la coordination entre Israël et l’Autorité palestinienne a atteint un niveau sans précédent au cours des dernières années. Les responsables des deux camps se rencontrent régulièrement, pour échanger des informations et des demandes.

L’absence de négociations israélo-palestiniennes depuis septembre 2010 et la récente signature d’un accord de réconciliation Hamas-Fatah a-t-elle grippé ce système ? « Pas du tout » répond le gradé, « pour l’instant les ordres restent les mêmes, de leur côté comme du nôtre ». Cette coordination a permis à Israël comme à l’Autorité palestinienne de lutter ces dernières années contre un ennemi commun : le Hamas. Que se passera-t-il si la réconciliation palestinienne est menée à son terme ?

Manifestations hebdomadaires de Palestiniens

Face à cette interrogation et face aux incertitudes liées aux projets onusiens des Palestiniens en septembre, l’armée de l’Etat hébreu se prépare. « Nous devons être prêts en termes de déploiement, d’équipement et de renseignement, précise notre interlocuteur qui cite à plusieurs reprises les manifestations hebdomadaires de Palestiniens dans le village de Bil’in, près du mur de séparation construit par Israël en Cisjordanie. Des rassemblements qui dégénèrent systématiquement en affrontements : jets de pierre des jeunes palestiniens contre grenades lacrymogènes et tirs de balles en caoutchouc des soldats israéliens.

Les tentatives d’infiltrations de manifestants venus de Syrie le 15 mai et le 5 juin dernier sur le plateau du Golan (plus de 20 victimes le 5 juin, selon Damas), ont aussi alerté les responsables militaires. L’un des « scénarios » de septembre pourrait être la multiplication de ces frictions. Et dans le contexte du « printemps arabe », les dirigeants de l’Etat hébreu et de l’armée réfléchissent sérieusement à un engrenage du type de celui de la place Tahrir au Caire, qui a vu la population égyptienne se dresser en masse contre Hosni Moubarak, jusqu’à la chute de celui-ci.

Ecrasées sous le soleil de ce début d’été, les collines de Cisjordanie et leurs habitants attendent septembre. Mais c’est un faux calme qui règne. En témoignent les actions de certains colons radicaux qui s’en prennent aux civils palestiniens et à leurs biens. Il y a quelques jours, l’armée israélienne a détruit un « avant-poste », une de ces colonies sauvages bâties sans l’accord des autorités de l’Etat hébreu. Pour se venger, des colons extrémistes ont tenté d’incendier la mosquée du village palestinien d’Al-Mughayer et ont peint sur sa façade « Prix à payer pour Alei Ayn » (le nom de l’outpost détruit).

Interrogé sur ce type d’actions et sur l’attitude de l’armée israélienne pour les prévenir, notre interlocuteur soupire : « Cela représente 50% de mon temps de travail ».

Pour en savoir plus :

- L'Etat palestinien naîtra-t-il à l'ONU cet automne ?

- Israël et les Occidentaux : Face à la nouvelle donne palestinienne

- Cisjordanie : le rassemblement de Bilin placé sous le signe du deuil 

- En Cisjordanie, des colons israéliens ont tenté d'incendier une mosquée 

- En Cisjordanie, les colons de Havat Gilad appellent à une «Journée de la colère»

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