En Syrie, la contestation continue, la répression aussi

Les manifestations se poursuivent en Syrie, où au moins 22 manifestants ont été tués notamment dans la région d'Idleb (nord-ouest). L'intervention de l'armée syrienne dans le nord-ouest du pays est particulièrement confuse depuis le début de la semaine.

La télévision publique syrienne a annoncé ce vendredi matin que l'armée avait lancé une « opération militaire pour arrêter des groupes armés » dans la région de Jisr el-Choughour, à l'appel, parait-il, des habitants. C'est dans cette région que 120 policiers ont été tués lundi dans des circonstances plutôt troubles.

D'un côté, le pouvoir de Damas accuse des « groupes armés » d'avoir « commis des atrocités ». Mais cette version est démentie par les militants des droits de l'homme qui défendent plutôt la thèse d'une mutinerie sévèrement réprimée, au sein du QG de la sécurité. Quant aux comités de coordination locale, qui alimentent quotidiennement les médias internationaux en informations, vidéo et témoignages, ils expliquent, de leur côté, n'être toujours pas en mesure de reconstituer les événements qui ont conduit à la mort des membres des forces de sécurité et ils demandent l'ouverture d'une enquête internationale.

L’exode des Syriens vers la Turquie

Ce dont on est sûr, c'est que ce sont ces violences et la peur de représailles qui ont poussé les habitants de cette région de l'autre côté de la frontière, en Turquie. Rien que ces dernières 48 heures, alors que les troupes de l'armée syrienne étaient en train de se regrouper dans la région et avaient commencé des opérations de ratissage, plus de 1 300 personnes ont fui vers la Turquie voisine, dont la frontière est à une quarantaine de km Jisr el-Choughour. Et Cela porte à environ 2 700 le nombre de Syriens venus se réfugier en Turquie depuis le début du mouvement de contestation.

Ankara tente d'anticiper le pire

Comment la Turquie, qui a déjà dû faire face, dans le passé, à un exode massif de Kurdes d'Irak, peut-elle accueillir des réfugiés syriens ? Ce précédent provoqué en 1991 par une offensive des troupes de Saddam Hussein contre les provinces nord de l'Irak a laissé des traces. A l'époque la Turquie, totalement débordée, avait laborieusement tenté de faire face mais des dizaines de réfugiés étaient morts de maladie et de blessures.

Aujourd'hui, de toute évidence, Ankara tente d'anticiper le pire : un camp sous haute sécurité a été monté à la frontière, un camp qui est pour l'instant totalement interdit à la presse. Ankara, qui entretient habituellement des liens assez étroits avec Damas, ne souhaite visiblement pas trop de publicité.

Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, vient d'accuser le régime syrien de commettre des « atrocités ». Ce sont des propos particulièrement forts. Il faut dire que la Turquie est dans une position particulièrement inconfortable. Ankara redoute le chaos qui pourrait se produire à sa frontière en cas de chute du régime. Qui plus est, le Premier ministre turc, qui s'est souvent déclaré dans le passé comme un ami du président Bachar el-Assad, ne semble apparemment n'avoir plus aucune influence sur son voisin. Recep Tayyip Erdogan explique avoir parlé directement à Bachar el-Assad il y 4 ou 5 jours. Mais il précise en même temps que les Syriens « sous-estiment la situation » et ne se comportent pas « humainement ».

L’ONU peine à adopter une résolution

En plus de la Turquie, les Etats-Unis, qui avaient également été plutôt discrets depuis le début du mouvement de contestation, commencent aussi à vraiment taper du poing sur la table. En tout cas, le secrétaire américain à la Défense Robert Gates n'a pas mâché ses mots ce vendredi matin, alors qu'il s'exprimait lors d'une conférence à Bruxelles. Il a évoqué « le massacre de vies innocentes » et s'est interrogé sur la « légitimité » du président Bachar el-Assad de continuer à gouverner.

Les Etats-Unis qui confirment ainsi leur position, alors qu'à New York, le Conseil de sécurité de l'ONU peine toujours à s'entendre sur une résolution présentée par la France et la Grande-Bretagne condamnant la répression en Syrie et demandant des comptes au régime syrien.

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