Avec notre correspondant à Mexico,
C’est un énième plan pour sauver le Tamaulipas qui vit dans un chaos total. Les habitants les plus riches ont abandonné la région depuis longtemps, les autres tentent de ne pas se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Les gens ont tellement peur que pour aller du port de Tampico jusqu’à la frontière nord-américaine, ils forment des caravanes sécurisées. Il faut s'inscrire entre 6h et 8h du matin, avoir fait le plein du véhicule qui doit être capable de rouler à 120 km/h pendant 2 h. La caravane est protégée par des patrouilles armées de mitrailleuses.
On se croirait dans les films de George Miller, dans Mad Max. Il ne se passe pas une journée sans enlèvements, rackets, fusillades, sans que les villes ne soient encerclées par des camions qui se mettent en travers des routes pour bloquer la circulation et empêcher les forces de l'ordre d'y pénétrer. Vivre ici, c’est vivre dans la violence.
Désordre total
Dans ce « Far West », qu'il est difficile d’imaginer, personne ne sait quoi faire. Il y a des fusillades en pleine rue. Celle du 10 avril a fait 21 morts et a duré plusieurs heures sous les yeux horrifiés de la population ! Les cartels de Zetas et les Zetas se battent entre eux pour le contrôle du territoire. Et en plus, il y a les affrontements avec les forces de l’ordre qui interviennent sans aucune logique ni coordination. Environ 60 % de la police est lié aux cartels. On ne sait plus, qui sont les bons, qui sont les mauvais. C’est un désordre total. Il y a une dizaine d’années que le tissu social a commencé à se dégrader.
Depuis, les autorités corrompues et complices ont abandonné la société en laissant faire les cartels de la drogue et les mafias pour se remplir les poches. L’Etat de droit a disparu. Même le Texas, tout proche, avait mis en garde le gouvernement mexicain et le président de la République contre la corruption du gouverneur et de son administration. La justice aurait alors pu mettre en examen les hauts fonctionnaires indélicats, mais c’est l’inverse qui s’est passé. Le pouvoir a protégé ses amis et les protège toujours.
Une stratégie qui ressemble aux précédentes
Le ministre de l’Intérieur a fini par entendre l’appel au secours de la population. Il s’est rendu sur place hier, pour faire des propositions. Il veut diviser la région en trois parties, mieux déployer les forces armées, augmenter l’action des services secrets et renforcer la prévention des délits. Cette nouvelle stratégie ressemble beaucoup aux précédentes. Elle n’a, en tout cas, aucune originalité.
La population reste sceptique. Elle considère qu’il y a une faillite de l’Etat mexicain qui ne contrôle plus la situation. La fureur des gens est à son comble. Dimanche dernier, ils ont une nouvelle fois manifesté, réclamant un recours aux instances internationales comme l’ONU. Autrement dit, ils souhaiteraient l’envoi de casques bleus mais il y a peu de chance que le président Enrique Peña Nieto accepte d’en arriver là.