Jeudi 1er septembre, les collégiens français ont fait la découverte de leurs nouveaux emplois du temps, quelque peu bouleversés par la réforme du collège entrée en vigueur le jour même. Parmi les nouveautés : les enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI). Ces EPI mêlent plusieurs disciplines au sein d’un même cours et comportent huit thèmes spécifiques : information, communication, citoyenneté, langues et cultures de l’Antiquité, langues et cultures étrangères ou, le cas échéant, régionales ; monde économique et professionnel, corps, santé, bien-être, sécurité, culture et création artistiques, et sciences, technologie et société. Les élèves étudieront deux de ces EPI par an. Le but étant qu’entre la 5e et la 3e, ces-derniers aient suivi au moins six des huit thématiques imposées.
Si pour la ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, les EPI devraient « (permettre) aux élèves de comprendre le sens de leurs apprentissages en les croisant, en les contextualisant et en les utilisant pour réaliser des projets collectifs concrets », de nombreux enseignants estiment au contraire qu’ils seront source de confusion pour tout le monde : « C’est clair pour personne cette histoire d’EPI, ni pour les parents d’élèves ni pour nous les professeurs. Les cours vont commencer et tout est encore très confus », explique Céline*, jeune professeure d’art plastique dans les Hauts-de-Seine.
Dans les prochains jours, elle animera son premier EPI, dont le thème portera sur « l’étude d’un bâtiment rénové », avec un professeur d’histoire-géographie. L’enseignante aura pour mission d’initier les élèves à un logiciel qui permet de modéliser les bâtiments en 3D. Une production qui servira d’étude de cas au professeur d’histoire qui pourra alors aborder son programme de manière plus concrète. Une pratique qui n’a, selon la jeune femme, rien de nouveau : « On montait déjà ce type de collaboration avant. On le faisait en fonction de nos affinités avec un sujet ou un autre professeur. Maintenant, parce que les thèmes et les plages horaires sont imposés, les projets sont parfois incohérents ».
« Le collège a besoin de réformes »
D’autres, au contraire, sont plus enthousiastes à l’idée de cette nouvelle formule. C’est le cas de Claire, professeure d’anglais dans un collège au nord du Gard, dans le sud de la France, qui fêtait sa 21e rentrée des classes : « Comme toute institution, l’école a besoin de réformes pour évoluer avec son temps, explique l’enseignante, il va nous falloir du temps pour nous adapter à ce changement mais le corps enseignant est habitué à ça ! ».
Dès septembre, et pendant huit mois, tous les professeurs de langues vivantes et d’arts plastiques de l’établissement, qui compte environ 600 élèves, participeront à l’EPI intitulé « L’art nous parle ». La professeure d’anglais devra choisir un tableau traitant de la civilisation enseignée. Au fil des mois, ses élèves imagineront l’histoire des personnages présents sur la toile : « Je ne fais que suivre le programme de 4e où on apprend à parler de soi, de son environnement et de son histoire. Sauf qu’ici on part d’un support visuel qui a parallèlement été analysé par un professeur d’art plastique et que l’exercice se fait sur le long terme ».
A la fin de l’année, tous les élèves qui participent au module s’approprieront l’histoire de leurs personnages qu’ils présenteront dans un enregistrement audio en anglais. C’est d’ailleurs ce produit fini qui est le plus important aux yeux de Claire : « Le travail qu’ils fournissent tous les jours prend une forme concrète. Ils se rendent alors mieux compte de ce qu’ils ont appris pendant l’année ». Pour Alain*, 37 ans et professeur de français dans un petit établissement du nord de la France, cette « transversalité » est bénéfique pour tout le monde : « Cela permet aux enfants de se rendre compte que tous les savoirs qu’on leur enseigne sont interconnectés. Cela amène aussi les enseignants à travailler ensemble et à repenser leurs façons d’enseigner. Ce qui me semble indispensable dans ce métier ! ».
Mais cet enthousiasme est loin d’être partagé par tout le corps enseignant puisque le Snes-FSU, premier syndicat d’enseignants du secondaire, a appelé le corps enseignants à faire grève le 8 septembre. La ministre de l’Education a, quant à elle, été catégorique mercredi au micro de RTL affirmant qu’il n’y aura « pas de moratoire » sur la réforme.
* Les prénoms ont été changés