Le directeur du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme n’ira pas au bout du mandat qui lui avait été confié, pour la deuxième fois, en novembre 2011. Il l’a annoncé sur son blog en ces termes : « J’ai décidé de quitter mes fonctions de directeur exécutif en mars prochain ; c’est là ma décision, même si elle a été difficile à prendre ». Et on peut le croire quand il affirme que cela a été difficile. Michel Kazatchkine a en effet consacré presque trois décennies de sa riche carrière à la lutte contre le sida.
Moins d’argent pour lutter contre le sida
Son départ « est dû exclusivement à un désaccord avec le conseil d’administration du Fonds » qui a décidé de lui adjoindre un directeur général, affirme-t-il. « Pour moi c’est clair, il ne peut y avoir deux têtes dans une organisation », a regretté Michel Kazatchkine. De plus, a-t-il poursuivi, « je réprouve » l’annonce des « réformes, dont un certain nombre me préoccupent », visant directement « l'enveloppe virtuellement réduite allouée au Fonds par les pays qui le financent. Les donateurs, et singulièrement les Etats-Unis, nous ont demandé de réduire de 2,2 milliards de dollars nos prévisions de ressources sur trois ans », a-t-il précisé.
Michel Kazatchkine s’est attaché à réfuter tout rapport entre sa démission et une relation avec la première dame de France. Des médias et singulièrement l’hebdomadaire Marianne avaient, début janvier 2012, affirmé que des « sommes conséquentes » (3,5 millions de dollars selon le journal) avaient été versées par le Fonds aux « activités philanthropiques » de l’épouse du président de la République et « de plusieurs agences appartenant à l’un de ses amis proches ». Dans son article, Marianne pose également la question du manque de transparence de la fondation créée par Carla Bruni-Sarkozy qui n’aurait, selon l’hebdomadaire, « ni comptabilité propre, ni compte en banque, ni secrétariat juridique, l’intégralité de ces activités étant rattachées à la Fondation de France ».
Dans le respect des règles
« Rumeurs, fausses informations, déformation de mes propos, depuis quelques semaines des médias peu scrupuleux, recherchant la sensation plutôt que l’information ont attaqué à travers moi le Fonds mondial, mais aussi mis en doute la campagne Born HIV free que le Fonds mondial a mené l’an dernier », écrit Michel Kazatchkine. « Le Fonds a été accusé de ne pas avoir respecté ses procédures d’appel d’offres, d'avoir versé de l’argent à la fondation de Carla Bruni-Sarkozy. Nous avons démenti. Encore et encore. Cette fois encore je m’attends à voir mes propos déformés, de nouvelles spéculations, de nouveaux amalgames. Ma décision de quitter le Fonds mondial n’a rien à voir avec cette campagne média. Je le dis ici de la façon la plus ferme », martèle le désormais ex-directeur qui rappelle dans le même élan que le Fonds a été son « engagement le plus important depuis dix ans ».
De son côté, le Fonds mondial contre le sida a également formellement démenti toutes les allégations de Marianne précisant cependant avoir versé 2,8 millions de dollars pour une campagne de Born HIV free visant à sensibiliser l’opinion publique française à la transmission du virus du sida de la mère à l’enfant. L’ensemble des contrats et le soutien apporté à une page du site carlabruni-sarkozy.org « ont respecté les règles et les procédures très strictes du Fonds mondial », assure ce dernier.
Réagissant à l’annonce du départ de Michel Kazatchkine, le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé a salué son « remarquable travail » à la tête du Fonds, « l’établissant comme l’instrument international le plus efficace » dans la lutte contre le sida. Créé en 2002 grâce aux fonds de Bill Gates, le Fonds mondial est la plus importante source de financement internationale pour la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Ce sont plus de 22,6 milliards de dollars qui ont été engagés depuis sa création pour soutenir différents programmes dans 150 pays.