Sur le papier au moins, l'appel d'Emmanuel Macron au Conseil français du culte musulman (CFCM) n'aura pas tardé à être entendu. À l'issue de l'entrevue qu'ils ont eue lundi avec le président de la République, les représentants de l'instance ont aussitôt promis par communiqué des annonces « très fortes » concernant le voile et l'islamisme en France.
Le vice-président Anouar Kbibech indique que le Conseil religieux tiendra dès ce mardi une réunion exceptionnelle. Il s'agit de répondre à la demande d'Emmanuel Macron pour qui le Conseil français du culte musulman doit avoir un discours clair sur la place du voile dans la société et notamment dans l'espace public.
La question s'est posée récemment lors d'une polémique sur la question du port du voile par des accompagnatrices lors des sorties scolaires.
Pour le président, l'objectif est d'éviter « la confusion des esprits » et séparer clairement la religion, la culture et l'islam politique.
Comment adapter le port du voile dans un pays laïc ? Quels sont les signes d'alerte de la radicalisation ? Voilà des questions sur lesquelles doit plancher le CFCM. Réponses attendues ce mardi.
■ Analyse
Pour Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof, le centre de recherches politiques de Sciences Po Paris, Emmanuel Macron a déjà la présidentielle de 2022 en tête.
Voile: Édouard Philippe ne souhaite pas de loi sur les accompagnants scolaires
■ Voile : 30 ans de débats sur la laïcité
Ce mardi, une proposition de loi de 46 sénateurs du groupe Les Républicains (LR) sera étudiée au Sénat. Déposée en juillet dernier, elle vise à interdire le port du voile durant les sorties scolaires. Une proposition de loi qui a de nombreux précédents.
C'est à la fin des années 1980 que le sujet du voile à l'école apparaît pour la première fois avec l'affaire dite des « collégiennes de Creil », au nord de Paris : trois filles voilées se retrouvent exclues temporairement. La polémique enfle et le Conseil d'État tranche.
Le port du foulard est compatible avec la laïcité, mais il est possible pour les chefs d'établissement d'exclure au cas par cas.
En 1994, le gouvernement Balladur établi une circulaire ciblant le port du voile en le distinguant les symboles religieux « discrets ». En une dizaine d'années, près d'une centaine de filles sont exclues de leur établissement scolaire pour ce motif.
Finalement en 2004, une loi finit par interdire le port de signes religieux ostentatoire dans le cadre de l’école publique.
En 2012, sous la présidence Sarkozy, le ministre de l’Éducation Luc Chatel, aborde pour la première le sujet des accompagnatrices scolaires. Il demande à ce qu'elles aussi se soumettent aux obligations de neutralité religieuse. En considérant qu'elles font partie de la sphère scolaire. Mais le Conseil d'État rejette cette demande. Il considère que ces mères accompagnatrices ne sont pas soumises aux obligations de laïcité.
Six ans plus tard, des sénateurs cherchent donc à contourner cette jurisprudence.