France: Édouard Philippe dans le Var pour échanger avec des enseignants inquiets

En France, 870 000 enseignants font leur pré-rentrée ce vendredi 30 août 2019. Une année délicate pour les professeurs avec la réforme du bac et celle des retraites. Les motifs d’inquiétude ne manquent pas pour le corps enseignant. Le chef du gouvernement et le ministre de l’Éducation se sont rendus dans un lycée du Var (sud-est).

Avec notre envoyé spécial lycée du Val d'Argens à Muy,  Julien Chavanne

Objectif du gouvernement : rassurer les profs. Car la rentrée est loin d’être sereine pour beaucoup d’entre eux, particulièrement ceux qui seront chargés des classes de première cette année, et qui ont ainsi passé une partie de leur été à retravailler leurs programmes.

C'est le cas de Stéphanie Deucabe, qui a passé son été à retravailler le programme de ses 1ères spécialité économique et sociale. Mais plus que ses vacances, ce qui l’inquiète, c'est l’avenir des bacheliers. Car le futur bac sera à la carte et moins égalitaire, selon elle.

« Ce qui est sûr, c'est que de faire un bac au contrôle continu, ça crée plusieurs bacs en fait ; ça crée le bac du lycée au Val d'Argens au Muy, ça crée à l'inverse les bacs des grands lycées dans les grandes villes, et donc ça ne peut que renforcer les inégalités sociales et territoriales », considère la professeure.

La crainte de lycées à plusieurs vitesses

La réforme du bac, qui supprime les filières S, ES et L en 2021, pourrait entraîner des lycées à plusieurs vitesses aux yeux de certains. « C'est absolument ce que nous craignons tous », conclut l'enseignante, qui passera la rencontre au fond de la salle, à dénoncer une « opération de com' qui ne changera rien ».

Lors de ces échanges avec ces professeurs varois, Jean-Michel Blanquer leur assure pourtant que tout va bien se passer. Le ministre de l'Éducation présente même ses excuses pour la surcharge de travail induite. Mais sans convaincre tous les enseignants présents à cette rencontre.

Le Premier ministre en renfort

Quant à Édouard Philippe, venu en renfort de son ministre, il s’est dit ouvert à des ajustements sur la réforme du bac. « Comment est-ce qu'elle se met en place ? Est-ce qu'elle suscite là aussi des interrogations ? C'est probable. Des ajustements nécessaires ? Peut-être », a consenti le Premier ministre.

Et d'ajouter, pour expliquer la posture que l'exécutif entend avoir face à l'Éducation nationale : « Ce que je veux dire, c'est qu'on ne réforme pas ou on ne transforme pas simplement pour donner le plaisir ou le sentiment qu'on réforme. On le fait parce qu'on identifie quelque chose qui ne va pas assez bien. »

Bac à plusieurs vitesses ? Faux, répond M. Philippe, qui parle d'une réforme « ambitieuse ». « L'ambition, ce n'est pas un gros mot, c'est le contraire de l'élitisme », selon lui. La nouvelle méthode vendue la veille par le gouvernement sur l’Écologie se décline désormais à l’Éducation.

Préavis de grève

Mme Deucabe est peu convaincue par les promesses d’ajustements et de concertation. « Leur faire part de nos inquiétudes, dit-elle, on l'a fait tout l'an dernier. Il n'y a eu absolument aucune réaction, aucune prise en compte des inquiétudes des enseignants. Ce n'est pas ici aujourd'hui que ça allait être fait. »

Plusieurs syndicats ont déposé des préavis de grève. Pas de quoi entamer la confiance ni la sérénité du gouvernement. Malgré une cote de popularité en baisse, le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer a prévenu : il mènera la réforme du bac jusqu’au bout. Maintenir le cap dans la concertation, donc.

Le retraite, autre source d'inquiétude des enseignants

La méthode vaudra aussi pour la réforme des retraites, promet le Premier ministre. Une autre inquiétude qui concerne les enseignants. Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin promettait d'ailleurs ce vendredi même une concertation de près d'un an sur ce sujet délicat, où le gouvernement avance avec prudence.

Dans le Var, Édouard Philippe a indiqué qu'il donnerait plus de détails sur la concertation prochainement, mais pas avant sa rencontre avec les partenaires sociaux en fin de semaine prochaine. « Sur un texte aussi important, nous voulons d'abord prendre le temps de partager », explique le Premier ministre.

« Si nous ne le faisions pas, vous nous le reprocheriez à juste titre ; prendre le temps de parler avec les Français, de bien expliquer les enjeux, de bien expliquer les solutions que nous proposons ; tenir compte de ce qui sera dit, pour faire un projet de loi qui sera présenté au Parlement dans les mois qui viennent. »

« Lorsque j'aurai rencontré les organisations syndicales et patronales, il me reviendra de faire des annonces sur le calendrier, le rythme, la méthode, mais ne croyez en rien que la détermination du gouvernement serait amoindrie. Nous voulons partager avec les Français et nous voulons aboutir », lance Édouard Philippe.

À écouter : l'émission «7 milliards de voisins» : Rentrée scolaire en France: les profs sont-ils sous tension ?

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