Cela fait plus d'un mois que la réforme de la SNCF a été annoncée, que ses principales mesures -suppression du statut des cheminots, ouverture à la concurrence du transport de voyageurs, notamment- sont connues. Durant tout ce temps, des discussions ont eu lieu entre syndicats et gouvernement. Pourtant, elles n'ont pas permis d'éviter cette grève. Au contraire, elles ont exacerbé la colère des cheminots. Le gouvernement a bien fait des annonces vendredi, mais rien de différent par rapport à ce qui avait été présenté, aucune concession. « Le cycle de discussions avec le gouvernement est complètement stérile, tonne Eric Meyer de Sud Rail. Il n'en sort rien, on n'a aucune réponse aux démarches unitaires engagées auprès du ministère, qui reste dans son plan, dans sa feuille de route, sans concertation et sans négociation. Nous avons clairement l'impression que c'est le gouvernement qui cherche le rapport de force. »
Comptabilisation des jours de grève
Dans ce contexte, gouvernement, cheminots et usagers se préparent à un mouvement très dur, et surtout à un mouvement très long : si les syndicats ont déposé un premier préavis de grève, ils comptent en fait déposer 18 au total, sur un rythme : deux jours de grève/trois jours de travail. Objectif : pouvoir tenir au moins trois mois. C'est inédit et c'est ce qui fait dire au patron de la SNCF, Guillaume Pépy, que cette grève va « pénaliser la vie de beaucoup de Français », et c'est ce qui l'a décidé à modifier les règles du décompte des jours de grève, considérant qu'en dépit des « 18 fois deux jours », il s'agit d'une seule grève.
Une manière de comptabiliser davantage de jours de grève pour les salariés. Laurent Brun, de la CGT Cheminots, trouve cela inacceptable : « La direction de la SNCF veut être en capacité de retenir [sur les salaires ndlr] les jours de repos entre les différents mouvements, pour alourdir la facture et casser socialement les grévistes. Chaque jour de grève que nous faisons, nous le payons, c'est normal. Mais nous ne voulons pas en payer plus ! C'est une méthode foncièrement déloyale, employée au début du conflit pour tenter de dissuader les agents de faire grève. »
Parler des sujets de fond
Les syndicats comptent saisir l'Inspection du travail, ils dénoncent également d'autres atteintes au droit de grève : des verbalisations lors de distribution de tracts, ou surtout le recours, par la direction de la SNCF, à des cheminots britanniques pour remplacer les grévistes. Ce que la direction de la SNCF dément.
Pas de quoi, en tout cas, décourager les syndicats, qui prédisent une grève très suivie. Pour défendre le statut des cheminots, avec notamment des avantages sur le calcul de leur retraite (sur le montant de leur retraite, puisqu'en ce qui concerne l'âge du départ, les cheminots sont au même régime que tout le monde) ; les cheminots ont également plus de jours de repos pour compenser leurs horaires décalés et leurs déplacements. Ce statut, les cheminots le jugent « non négociable. »
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Mais ce n'est pas la seule de leur revendication, et c'est ce que tient à préciser Eric Meyer de Sud Rail : « On veut mettre sur la table plusieurs sujets : ce que l'on veut comme service public ferroviaire pour demain, comme politique d'aménagement du territoire, comme continuité territoriale. La direction de la SNCF et le ministère mettent un écran de fumée devant tout ça [en ne parlant que, ndlr] du statut des cheminots, mais on espère que cette grève va nous permettre de vraiment parler du fond des choses. »
Dès ce lundi soir Guillaume Pépy, patron de la SNCF, conseille aux voyageurs de reporter leurs déplacements ou de ne pas prendre le train.