Le suicide est une énigme. Tout comme il est difficile d’identifier les raisons qui poussent quelqu’un à se donner la mort, il est périlleux de dire avec certitude pourquoi depuis les années 1980, on se suicide moins qu’avant. Mais des hypothèses plus fortes que d’autres émergent.
« Dans le domaine du soin, il y a quelque chose qui est intervenu justement dans les années 85-86, c’est l’autorisation donnée au médecin généraliste de prescrire des antidépresseurs du style Prozac, explique Christian Baudelot, sociologue, est co-auteur de l’ouvrage Suicide – l’envers de notre monde, aux éditions du Seuil. Cela a été introduit dans tous les pays européen au même moment et maintenant il y a un assez grand accord pour dire que ça réduit considérablement le suicide ».
Mais ce n’est pas seulement une affaire de chimie. La prise en charge de la souffrance psychique s’est améliorée, les psys sont beaucoup plus nombreux ; le tabou ne règne plus en maître.
« Le fait d’aller consulter un psychologue ou un psychiatre est beaucoup plus fréquent qu’avant et surtout n’est pas du tout stigmatisé comme une sorte d’aveu de folie, ajoute Christian Baudelot. Avant, on allait chez le psy si on était fou, ce qui n’est plus tout le cas et aujourd’hui la notion de dépression est admise par tout le monde, ce qui n’est absolument pas le cas auparavant ». Ainsi c’est le regard de la société sur la souffrance psychique qui a changé.