En se rendant au chevet de Théo, victime d'un viol lors de son interpellation jeudi 2 février, François Hollande a tenté de rassurer le jeune homme et sa famille sur les suites qui seront apportées à cette affaire. Le chef de l'Etat a ainsi déclaré : « La justice est saisie, il faut lui faire confiance ».
Le chef de l'État, resté une demi-heure avec le jeune homme et plusieurs membres de sa famille, a expliqué qu'il entendait par sa présence « souligner combien » Théo, un « jeune qui avait toujours été connu pour [son] comportement exemplaire », « avait réagi avec dignité et avec responsabilité après ce qui lui est arrivé ».
D'une voix fatiguée, Théo a exhorté les jeunes à ne « pas faire la guerre » et à « rester unis », affirmant avoir « confiance en la justice ». Dans une allusion aux violences qui se sont produites ces trois dernières nuits dans la cité des 3 000, où des policiers menacés ont procédé à des tirs de sommation à balles réelles, il a dit vouloir retrouver sa ville « comme il l'avait laissée ».
Dix-sept jeunes seront présentés mercredi à la justice, parmi lesquels onze mineurs, pour la plupart soupçonnés d'avoir préparé des attaques contre les forces de l'ordre lors de ces échauffourées.
Tension à la cité des 3000
Malgré ce geste d’apaisement de François Hollande, la tension reste palpable dans la cité des 3000. « C'est assez hallucinant. Il y a un déploiement extraordinaire comme si on était en zone de guerre. Il y a un hélicoptère qui fait des tours sans arrêt ». Un hélicoptère au-dessus du quartier de la rose des vents à Aulnay, des policiers à cheval, d’autres casqués et équipés de boucliers, voilà qui surprend Roselyne, une habitante de la cité des 3000 qui, comme d’autres, dénonce les contrôles au faciès et des policiers qualifiés de « cowboys ».
« Ça arrive que la police vienne, contrôle, et que ce soit un peu brutal. Mais personnellement, je ne suis pas touché par ce genre de choses », confie la jeune femme à RFI. Roselyne n’a jamais vécu de brimades lors de contrôles policiers, mais depuis ce week-end elle interdit à son fils de sortir, craignant de nouveaux affrontements.
D’autres dans la cité ont un point de vue beaucoup plus radical sur ces relations entre jeunes et policiers. C’est le cas d’Hakim, 15 ans : « Je sors dehors, en bas de chez moi. Il y a un policier qui est venu et qui m'a gazé et qui m'a dit : "Tu cours, sale arabe !" »
A la base, les policiers doivent nous défendre, aujourd’hui, ils nous agressent. « Justice pour Théo », dit le slogan peint sur un mur à côté d’un véhicule calciné. Ce qui blesse, ce sont aussi les insultes, dit Salim, 17 ans. « Ça dépend quels policiers. Il y en a qui sont mauvais, il y en a plus qui sont racistes maintenant. Ils insultent les Noirs, les Arabes, mais après ça dépend, on n'est pas tous pareils. Il y a des policiers qui sont quand même sympas. »
Afin d’éviter que la situation ne dégénère, le maire d’Aulnay-sous-Bois a demandé aux autorités d’envoyer un « signal fort » aux habitants pour leur dire que « l’Etat est derrière eux et non contre eux ».
Inquiétude à l'Assemblée nationale
A l'Assemblée nationale, Bernard Cazeneuve a de son côté manifesté la préoccupation du gouvernement. « Lorsqu'il y a des manquements graves à la déontologie, il faut que la plus grande fermeté prévale à l'égard de ceux qui sont à l'origine de ces manquements », a réagi le Premier ministre.
Promettre que la justice passera pour calmer les esprits. Car après les violences qui ont éclaté ces derniers jours, certains élus ne cachent pas leur inquiétude, à l'image du député socialiste de la circonscription d'Aulnay-sous-Bois, Daniel Goldberg : « Si on veut aider Théo aujourd'hui, ce n'est pas en cassant des abris-bus ou en brûlant des voitures. Bien sûr que la situation est sur des charbons ardents. La question qui est posée aujourd'hui, c'est l'ensemble des rapports police-population, en particulier dans nos quartiers populaires. »
Une situation difficile dans certains quartiers qui incite le député Les Républicains Jacques Myard à ne pas jeter l'opprobre sur les policiers. « Il faut éviter ce genre de dérapage, mais il faut aussi comprendre les policiers qui sont sous tension permanente. » Bernard Cazeneuve, lui, a rappelé que les policiers se devaient d'être à chaque instant exemplaires.