Bruno Bézard ne marche pas ses mots. Le recours à l’arbitrage, c’était la pire des solutions, un choix tout simplement contraire - dit-il - aux intérêts de l’Etat. Et le haut fonctionnaire du ministère des Finances s’explique : Nous n’étions pas hostiles à l’arbitrage par conservatisme, mais - il le martèle - n’était pas dans l’intérêt de l’Etat de recourir à une justice privée, d’autant - ajoute-t-il - que la Cour de cassation venait de nous donner raison.
Amer, Bruno Bézard le confesse : on sentait bien que toutes les forces d’une partie de l’appareil d’Etat tiraient dans le sens d’un arbitrage, malgré notre position. Il indique qu’il a multiplié les notes très claires d’avertissement à la ministre. Lui ont-t-elles été transmises ? Il laisse planer un doute. Le cabinet - dit-il - opère toujours un filtre.
En revanche, ce haut fonctionnaire a des mots très durs à l’égard de la décision de Christine Lagarde de renoncer à un recours en annulation de cette sentence arbitrale. Devant une décision aussi scandaleuse, même si nous n’avions aucune chance sur mille de gagner ce recours - dit-il - il fallait le tenter. La Cour appréciera si ce choix politique constitue une négligence. Mais Bruno Bézard fait part de sa conviction. Beaucoup de choses - conclut-il - sont très étonnantes dans ce dossier.
Patrick Maisonneuve, l'avocat de Christine Lagarde a vivement réagi à ce témoignage. « S'il estimait que c'était un scandale d'Etat, lorsqu'on a son bureau à 30 mètres du bureau de la ministre, ne peut-on pas demander un rendez-vous s'il y a urgence, si c'est aussi considérable que ça en termes de risques, pour rencontrer la ministre ? Il ne l'a pas fait. Certains membres de la Cour lui ont demandé pourquoi ? Il a répondu qu'il ne l'a pas fait », estime-t-il.