Attentat de Nice: la classe politique se déchire sur la sécurité

«L'esprit du 11 janvier» 2015, qui avait vu la classe politique française s'unir au lendemain de premiers attentats jihadistes, a fait long feu: immédiatement après l'attaque meurtrière de Nice, l'opposition de droite a accusé le pouvoir socialiste d'inefficacité dans la lutte antiterroriste. François Hollande appelle à l'«unité».

Il y a certes beaucoup d’hommages et de manifestations de soutien aux victimes, mais ils sont déjà très nombreux dans l’opposition à poser des questions, voire à demander des comptes.

Oublié l’esprit du 11-Janvier, oubliée « la concorde » qui avait prévalu lors du Congrès de Versailles en novembre, après les attentats du Bataclan, ce troisième attentat en 18 mois en France aura fait voler en éclats toute idée d’union nationale. Quelques heures seulement après le carnage à Nice, l’opposition est montée au créneau pour dénoncer « l'impuissance de l'exécutif » face au terrorisme.

Le centriste François Bayrou a attaqué dès vendredi matin avec ces mots : « On ne peut pas se contenter de dire que l'on fait ce qu'on peut. »

Pour le candidat à la primaire de la droite Alain Juppé, « si tous les moyens avaient été pris, le drame n'aurait pas eu lieu ». Et dans un tweet, Marine Le Pen d’écrire : « La lutte contre le fondamentalisme islamiste doit démarrer. » Une manière de dire en creux que le gouvernement est impuissant.

L'état d'urgence en débat

Il y a déjà, aussi, ce débat sur l’état d’urgence. A droite, le député Éric Ciotti veut qu’il soit permanent. Mais pour l’ex-Premier ministre François Fillon, l’état d’urgence ne suffit pas. Ce débat donne un avant-goût des débats houleux qui s’annoncent dans l’hémicycle. L’Assemblée nationale est saisie la semaine prochaine d’une prolongation de l’état d’urgence.

L'ex-maire de Nice et président Les Républicains (LR) du Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur, Christian Estrosi, s'est exprimé lui aussi vendredi matin sur les ondes de France Inter. Il a critiqué le président de la République François Hollande sur la levée de l'Etat d'urgence initialement prévue le 26 juillet.

Sur BFM TV, il a également déclaré : « Après Charlie Hebdo, on a oublié et on a eu le Bataclan. Après le Bataclan, on a oublié et on a eu Bruxelles. Après Bruxelles, on a oublié et on a Nice. Alors, il y a des questions auxquelles il faudra répondre. »

« Comment est-il possible, ajoute le député, alors que la promenade des Anglais était privatisée, que ce véhicule ait pu y accéder ? Combien de policiers nationaux étaient en poste et quels sont les moyens qui avaient été mis en œuvre, alors que notre pays est encore en état d'urgence, pour éviter cela ? », a déclaré Christian Estrosi.

Surenchère sécuritaire d'une partie des députés de droite

Henri Guaino regrettant l'absence de lance-roquettes dans les mains des militaires. Le carnage aurait pu être évité, à en croire le député (LR) des Yvelines. « On doit pouvoir stopper un camion qui ne répond pas aux sommations. (...) Il suffit de mettre à l'entrée de la promenade des Anglais un militaire avec un lance-roquettes et il arrêtera le camion », a-t-il déclaré sur RTL.

Frédéric Lefebvre, député (LR) des Français de l'étranger, estime l'état d'urgence insuffisant et demande l'instauration de l'état de siège, en application de l'article 36 de la Constitution, qui prévoit « le transfert au ministre de la Défense et aux autorités militaires de notre sécurité civile ». Pour sa part, Nicolas Dupont-Aignan, député de l'Essonne et président de Debout la France (DLF), réclame « l'expulsion systématique des étrangers condamnés au terme de leur peine ».

Député (LR) des Yvelines, Jacques Myard a quant à lui prôné, parmi huit propositions, « d'expulser tous les binationaux en voie de radicalisation » et « d'appliquer partout sur le territoire national l'interdiction du voile ». Il préconise également de « renouer des relations diplomatiques avec Damas pour obtenir des renseignements »dans la lutte contre l'organisation Etat islamique (EI), implantée en Syrie et en Irak.

A gauche en revanche, jusqu’ici, pas de voix dissonantes : on fait bloc derrière le président, le Premier ministre, les appels à l’unité nationale. La majorité reste traumatisée aussi par les fractures du débat post-13-Novembre et le feuilleton mortifère de la déchéance de nationalité.

Hollande appelle à l'« unité », ne veut pas s'« abaisser » à des « outrances »

Face aux critiques de l'opposition, François Hollande appelle à « l'unité » et à la « cohésion ».

« C'est mon rôle, c'est ma responsabilité de ne pas me laisser détourner de l'engagement que j'ai pris au nom des Français de les protéger, de ne pas m'abaisser à je ne sais quelle outrance, excès quand il s'agit de répondre, et de répondre juste, aux défis qui nous sont lancés en y mettant tous les moyens nécessaires », a déclaré M. Hollande, après s'être rendu au chevet de plusieurs victimes.

« La France va devoir vivre avec le terrorisme », déclare le Premier ministre

« Nous avons changé d'époque », « la France va devoir vivre avec le terrorisme ». Voilà ce qu'a déclaré Manuels Valls sur un ton ferme, le visage fermé. Et pour faire face à cette menace, la seule réponse digne, a expliqué le Premier ministre, c'est d'« être rassemblé ».

« Une campagne présidentielle ne mérite pas qu'on divise le pays », a déclaré vendredi soir le Premier ministre Manuel Valls après les critiques d'une partie de la droite contre l'exécutif après l'attentat de Nice.

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