Loi travail: la menace d'un nouveau recours au 49-3

En France, une nouvelle journée de mobilisation se déroule à Paris contre le projet de loi Travail, mardi 5 juillet 2016. La douzième depuis le début de la contestation. Le texte retourne devant les députés. D'ores et déjà, on peut affirmer que cette deuxième lecture sera douloureuse. Quelque 500 amendements ont été déposés sur le seul article 2 du projet, celui qui crispe le plus les débats. Le vote, en revanche, pourrait être escamoté avec l'usage, annoncé, du 49-3.

Une rude journée attend Manuel Valls ce mardi avec, en ligne de mire, une décision à prendre concernant le débat sur le projet de loi Travail. Il va falloir choisir : utiliser ou non l’arme fatale du 49-3, qui permet de faire passer un texte sans vote à l'Assemblée nationale.

Quand l'annoncer ? Tout de suite pour éviter de nouvelles empoignades ? Plus tard pour tenter une ultime conciliation avec les « frondeurs » ? C’est bien la seule question posée, tant le recours au 49-3 semble acquis. Même le président est monté en première ligne la semaine dernière. Le texte ne sera pas modifié, a dit François Hollande.

« Tous les signaux économiques sont au vert, cela montre que tous nos choix jusqu’ici sont les bons », décrypte un conseiller. Fataliste, ce conseiller ajoute : « De toute façon, on paie déjà à gauche le pacte de responsabilité, alors autant continuer ce qu’on pense efficace. »

L'article 49-3 utilisé dès ce mardi ?

Pour Manuel Valls, « ce n’est pas la peine de perdre du temps, après le petit jeu qui consiste à se renvoyer la patate chaude ». Le Premier ministre explique : « On a un accord très clair avec la CFDT. On ne va pas prendre le moindre risque de remettre les choses en cause. »

Autant s'épargner quelques heures de débat de façade, c'est ce que plaident certains responsables dans la majorité. Leur solution : un 49-3 dégaîné dès ce mardi après-midi, avant même le début des discussions.

En face, les contestataires - frondeurs, aubrystes, même légitimistes - insistent. Ils sont 123 députés, soit la moitié du groupe PS, à avoir signé un amendement sur le paiement des heures supplémentaires, un amendement qui pourrait bien ne jamais être débattu. Cela va donc au-delà des « frondeurs ».

Hollande ou la stratégie jusqu'au boutiste

M. Valls estime que les syndicats CGT et FO sont « dans l’impasse ». Le pari, c’est qu’une fois la loi adoptée, la situation sociale se calme. La vraie inquiétude du Premier ministre, c’est « dans l’hypothèse d’un 49-3, l’utilisation que certains peuvent en faire pour commettre des actes de violence ». « Pas la CGT », ajoute Manuel Valls, mais « l’ultra-gauche ».

Le Premier ministre se dit prêt. Pour lui, la question du 49-3 est « résolue depuis le début ». « On est pour longtemps dans une période de confusion, d'insatisfaction et de troubles. La présidentielle se jouera sur la capacité à tenir dans l’adversité », analyse un ami du président.

Se dessine en creux le portrait d’un candidat Hollande qui ferait en substance le pari suivant : assumer le divorce avec une partie de sa majorité, pour se sculpter une image de fermeté payante dans les urnes en 2017. Mais en attendant, plus aucun déplacement gouvernemental ne s'effectue sans perturbation et l'ambiance parmi les députés est très mauvaise.

Climat délétère à l'Assemblée nationale

Demander à un parlementaire comment s'est passé son week-end en circonscription, cela revient à le voir s'affaisser, la tête rentrée dans les épaules, et entendre s’échapper un long soupir. Toutes tendances confondues, les socialistes racontent  ces regards qui se détournent, ces mains qui ne veulent pas être serrées, ces coups de colère à encaisser.

Loi Travail, chômage, immigration, attentats... tout y passe, disent-ils. Tous craignaient donc des images catastrophiques pour leur rentrée politique ; une université d'été bunkerisée avec militants et élus encadrés par des haies de policiers. D'où l'annulation sans précédent de l'université d'été de La Rochelle.

Une nouvelle journée de mobilisation a lieu ce mardi, la douzième depuis le début de la contestation autour de la loi Travail. Et ce conflit social, les images des manifestations, pèseraient sur les investissements étrangers. C'est du moins ce qu'assure Bernard Vivier, directeur de l'Institut supérieur du travail, sur RFI.

→ À relire :Les amendements proposés par le gouvernement peinent à convaincre

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