Des sifflets au passage de Cécile Duflot, habillée ce jour-là en robe ; les caquètements d'un député de droite durant l'intervention d'une élue écologiste ; les dérapages sexistes de certains parlementaires ; tous ces faits ont beaucoup fait parler ces derniers mois. Est-ce à dire qu'ils seraient plus nombreux que par le passé et que le harcèlement serait plus prégnant dans le monde politique qu'ailleurs ?
« Non, assure Catherine Coutelle. Je mets au défi quiconque de me prouver le contraire. Aucun chiffre n'a jamais été publié là-dessus. » Pour la présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, le problème ne touche pas plus la classe politique que le reste de la société. « Je pense que c'est un jeu de pouvoir et de domination dans tous les milieux, explique-t-elle, comme le sport, la mode, etc. »
Selon Catherine Coutelle, le palais Bourbon n'est tout simplement pas épargné par ce fléau général, et le phénomène devient plus visible en raison de l'augmentation du nombre de femmes. « Avant, l'Assemblée était un monde d'hommes, analyse la députée socialiste. Maintenant, nous sommes 27 % de femmes et on ne laisse pas passer ce genre de comportements. »
Un appel pour lever l’omerta
Après « Bas les pattes », signé il y a un an par des journalistes, une pétition « Violences sexuelles en politique, levons l'omerta » a été lancée lundi par le collectif Osez le féminisme. L’objectif est d’interpeler les politiques et de dénoncer une pratique plutôt courante dans ce milieu de pouvoir.
« Il y a des agresseurs aux plus hautes sphères du pouvoir, on est en train de s’en apercevoir. Mais il y a aussi des victimes dans les plus hautes sphères du pouvoir. C’est vraiment partout », explique Caroline de Haas, militante féministe et ex-militante PS, qui dénonce un tabou encore plus difficile à briser en politique qu’ailleurs.
« La première chose, c’est que comme c’est un lieu de pouvoir, où il est exercé en grande majorité par les hommes, quand l’agression sexuelle est exercée par quelqu’un qui a du pouvoir, eh bien c’est encore plus difficile de parler, de lever l’omerta », explique Eléonore Stevenant-Morguier, membre du conseil d'administration de l'association Osez le féminisme.
« Et puis, ajoute-t-elle, il y a une deuxième caractéristique, qui pour moi devrait appeler les partis politiques à une exemplarité sans faille, c’est que ce sont les partis politiques qui décident des lois, qui font la politique ! Comment vous pouvez imaginer un seul instant qu’ils vont réellement lutter contre les violences à l’encontre des femmes, si eux-mêmes, dans leurs propres organisations, ne prennent pas de mesures ? »
Avec cette pétition, qui a déjà recueilli 1 500 signatures, l’association demande à ce que les responsables politiques prennent des mesures concrètes et immédiates pour lutter contre les agressions sexuelles au sein même de leurs partis.
■ Ouverture d'une information judiciaire, et réaction d'Emmanuelle Cosse
Le parquet de Paris a annoncé ce mardi 10 mai 2016 l'ouverture d'une enquête préliminaire contre Denis Baupin. Les « allégations » publiées par la presse portent « sur des faits susceptibles d'être qualifiés d'agressions sexuelles, harcèlements sexuels, appels téléphoniques malveillants », indique le parquet, qui précise dans son communiqué qu'à ce stade, « aucune plainte relative à ces faits n'a été reçue », et que « l'enquête va s'attacher à recueillir les témoignages des victimes présumées ».
De son côté, Emmanuelle Cosse, épouse de Denis Baupin et actuelle ministre française du Logement, a réagi à la démission de son mari et aux révélations parues dans la presse, ce mardi matin au micro de France Info. Extrait ci-dessous.
→ L'affaire Baupin fait la Une de la presse française ce mardi