Les maires de France n'en peuvent plus de se serrer la ceinture

Les maires sont mécontents et tirent la sonnette d’alarme. Ils se disent asphyxiés depuis la baisse des dotations de l’Etat. Autrement dit, depuis que l’Etat a diminué l’argent versé aux collectivités territoriales, nombre d’entre elles ne parviennent plus à boucler leur budget. Certaines sont au bord de la faillite.

On les accuse de tous les maux. A en croire leurs détracteurs, les 36 000 communes de France jetteraient l’argent par les fenêtres et dépenseraient sans compter. La vérité est bien éloignée de ces affirmations selon le président de l’Association des maires de France (AMF) et ancien ministre UMP François Baroin. Pour lui, l’effort demandé aux communes est tout simplement « démesuré ». 

Un millier de communes dans le rouge

Sur l’effort global de 21 milliards d’euros prévus en 2015 sur les finances publiques de la France, la part des collectivités locales sera de 3,7 milliards, dont 2 milliards pour les communes et regroupement de communes. Ce plan a été entamé en 2014 pour se poursuivre jusqu’en 2017. A cette date, le manque à gagner pour les communes se chiffrera à 15,7 milliards d’euros.

Ces restrictions se traduiront, assure une enquête menée par l’AMF, par une baisse de 25 % de l’investissement (construction de bâtiments, travaux publics, mises aux normes…) de 2014 à 2017. « C’est entre 0,6 et 0,7 point de croissance qui peuvent disparaître d’ici 2017, et 60 000 à 80 000 emplois dans le bâtiment », a chiffré François Baroin.

Environ un millier de communes sont déjà dans le rouge alors que le plan va encore monter en puissance dans les prochaines années et les ressources des collectivités diminuer d’autant. Plusieurs maires ont déjà fait connaître leurs difficultés. Ici c’est la piscine qui a été fermée, là les activités sportives gratuites sont désormais payantes, pendant qu’ailleurs on diminue les heures d’ouverture de la crèche, de l’état civil ou de la médiathèque.

« Ce n’est pas le scoop de l’année, cette affaire-là », ironise le politologue Olivier Rouquan*. « Depuis 10 ans, on demande aux collectivités locales de revoir leurs critères de bonne gestion et notamment leur masse salariale. La Cour des comptes multiplie les rapports et ne cesse de dire qu’il faut abaisser les effectifs. Or, on constate que les communes n’ont pas diminué leur personnel, elles ont même continué à embaucher. Il n’y a peut-être pas eu suffisamment de rigueur du point de vue de la gestion de la part de certaines communes », suggère Olivier Rouquan.

Empilement de difficultés

Devant l’inquiétude soulevée par ces baisses de dotation, plusieurs réunions ont eu lieu entre le Premier ministre et l’Association des maires de France. Manuel Valls a proposé la création d’un fonds destiné « à préserver la capacité d’investissement » des communes. Celui-ci pourrait être doté d’un milliard d’euros. Le Premier ministre a par ailleurs réaffirmé sa volonté de maintenir la diminution de la dotation de l’Etat telle qu’elle a été décidée sous la bannière du « redressement économique ».   

En l’état actuel des choses, précise encore Olivier Rouquan, « les communes vont devoir faire des choix politiques et il y a sans doute des efforts à faire, des marges à trouver. Les collectivités locales, les communes vont devoir renoncer à assumer un certain nombre de services à la population. Il faut le dire, il faut l’expliquer. Mais on peut quand même s’attendre, avec des schémas de mutualisation, à de leviers qui permettront quand même d’assurer des services à moyens humains constants ou diminués ».

Les élus locaux reconnaissent qu’entre 2013 et 2014, les frais de personnel ont connu une hausse de 4 %. Mais, tiennent-ils à préciser, la moitié de cette hausse est la conséquence de décisions prises par l’Etat, telle la réforme des rythmes scolaires qui a nécessité l’embauche d’animateurs. Cela n’empêche pas évidemment l’AMF d’étudier tous les moyens pour limiter et faire baisser les charges des communes. S’ils ne veulent pas augmenter les impôts locaux, il reste à envisager le non-remplacement des départs en retraite ou départs volontaires, la limitation de nouvelles embauches, la maîtrise de l’avancement, la modification du temps de travail, etc. Autant dire que les temps qui viennent seront ceux de l’empilement des difficultés pour nombre de collectivités territoriales.  

*Olivier Rouquan auteur de Culture territoriale, Ed. Gualino

 

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