C’est le quotidien économique Les Echos qui met à la Une les grandes lignes du rapport rédigé par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances ( IGF). Ces trois corps ont été missionnés il y a un an par le ministère de l’Economie et des Finances pour décortiquer les 46 milliards d’euros (plus de 2 % du PIB) consacrés au logement par les finances publiques.
Exclure des APL les mieux nantis
Dans l’enchevêtrement de la politique du logement mise à plat dans le rapport, quelques points saillants ont retenu l’attention des signataires qui recommandent certaines mesures qui ne plairont certainement pas à tout le monde. Parmi celles qui seront sûrement le plus débattues, figure la suppression du rattachement fiscal des étudiants percevant une APL (Aide personnalisée au logement). Motif invoqué : l’aide financière apportée par les parents (en moyenne 850 euros, mais qui peut dépasser les 2 000 euros), n’est pas prise en compte dans le calcul de l’aide versée par l’Etat.
Selon les estimations des auteurs du rapport, cette seule mesure visant l’APL économiserait 400 millions d’euros dès la deuxième année. Mais ce n’est pas tout, un autre changement concernant les APL est proposé ; il s’agirait d’établir un « taux d’effort » en calculant la part du prix du loyer par rapport aux revenus du ménage et de moduler les aides en fonction de ce taux.
Souvent accusées de faire grimper les prix des loyers, les APL ont décidément retenu l’attention des experts qui suggèrent d’aller encore plus loin pour restreindre leur attribution. Par exemple en excluant les loyers au-delà d’un certain montant et les ménages disposant d’un certain niveau de patrimoine. Peut-être que les auteurs du rapport ont estimé qu’il était temps de rappeler que les APL avaient été créées à l’origine pour donner un coup de pouce aux plus modestes et aux étudiants.
Anticipant les réactions hostiles qui ne manqueraient pas de se manifester, la ministre du Logement Silvia Pinel, s’est empressée de mettre les points sur les « i ». « Le rapport d’inspection rendu public par Les Echos est un document de travail. Il n’exprime pas la position du gouvernement, mais il vient contribuer à sa réflexion ».
« La priorité du gouvernement c’est la relance de la construction de logements pour répondre aux besoins des Français et le redémarrage d’un secteur essentiel de notre économie, insiste la ministre dans un communiqué. La nécessaire maîtrise des dépenses publiques doit être conciliée avec cet objectif prioritaire ».
Constat sévère
Il n’en demeure pas moins que c’est tout l’édifice de la politique du logement qui est sévèrement analysé dans ce rapport. Concernant par exemple la réduction d’impôt de 18 % accordée à l’investissement locatif dans le neuf, le rapport suggère de le ramener à 13 % avec en contrepartie le relèvement du loyer autorisé qui doit être en deçà du prix du marché. Une réforme qui rapporterait 180 millions d’euros par an, évaluent les auteurs.
La construction de logements neufs recule en France avec moins de 300 000 mises en chantiers en 2014, pour un objectif gouvernemental de 500 000. De quoi entretenir la tension sur le marché qui n‘a jamais été aussi forte alors que l’Etat n’a jamais versé autant pour soutenir le secteur. Un paradoxe que dénoncent les inspecteurs en pointant les multiples intervenants à tous les niveaux que sont l’Etat, les communes, les opérateurs publics…
Pour eux comme pour le locataire ou l’acheteur lambda, il s’agit ensuite de naviguer, souvent à vue, entre subventions, prestations sociales, niches fiscales, suivant « des logiques compartimentées », des objectifs « multiples et souvent en contradiction », sans oublier l’absence de connaissance « précise » des besoins, constate sans détour le rapport. Il souligne encore qu’entre 1995 et 2008, seuls 5,1 % des logements ont été construits à Paris et dans sa petite couronne, tandis que la surproduction de logements dans des zones déjà bien pourvues a entraîné des vacances locatives.
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