Manuel Valls prépare les esprits avant une rentrée «difficile»

Le gouvernement part en vacances, mais pense déjà à la rentrée. Un séminaire gouvernemental était organisé, vendredi 1er août, à l'Elysée, autour de François Hollande et de Manuel Valls, pour dégager les priorités de la rentrée : emploi, pouvoir d'achat et investissements. Une rentrée qui s'annonce « difficile », de l'aveu même du Premier ministre.

Tableau noir pour la rentrée. De sombres perspectives. C'est la tonalité du discours délivré par le Premier ministre Manuel Valls à l'issue du dernier séminaire gouvernemental de l’année. Un chômage « tout à fait insupportable », « une conjoncture économique difficile », « une crise de confiance qu'il nous faut endiguer »...

Un vocabulaire inhabituel depuis l'élection de François Hollande. Pendant deux ans, le président espérait doper les Français à son propre optimisme, en forme de méthode Coué quand il promet l'inversion de la courbe du chômage, ou lorsque, il y a tout juste un an, il annonce que « la reprise est là ». La fameuse reprise de la croissance économique, ce Graal qui libèrerait la France de tous ses maux, chômage et déficits...

A l'été 2012, il y avait d'ailleurs eu un vrai débat à la tête de l'exécutif entre François Hollande et son Premier ministre. Jean-Marc Ayrault souhaitait alerter les Français sur l'état réel de la France, le niveau de ses déficits et de son endettement. Il fallait à ses yeux faire de la politique, s'attarder davantage sur l'héritage du sarkozysme, et notamment sur l'explosion de la dette en cinq ans, causée par la crise, mais aussi par les multiples cadeaux fiscaux. Veto de François Hollande, qui avait pourtant fait largement campagne sur l'antisarkozysme : pas question de casser la confiance et d'alarmer les marchés. Quelques jours plus tard, François Hollande faisait la promesse, un peu folle au vu des prévisions de croissance, d'inverser la courbe du chômage.

« Discours de vérité »

Il s’agit donc d’un revirement dans la communication de l'exécutif. Il y a d'abord l'effet Valls. Le Premier ministre le répète sur le tous les tons depuis son discours de politique générale à l'Assemblée nationale, au lendemain des élections municipales et de sa nomination : « Je veux tenir un discours de vérité aux Français » ; Manuel Valls se veut, à cet égard, l'héritier de Pierre Mendès France, éphémère président du Conseil dans les années 1950, mais qui a marqué durablement les mémoires socialistes.

Un « discours de vérité » qui s'appuie sur une réalité économique qu'il devient de plus en plus difficile d'esquiver ; François Hollande, devant la presse il y a quelques jours, avait le premier reconnu que la croissance pouvait « s'affaiblir ». On est bien là au coeur du problème : la croissance. Sans elle, le chômage augmente, les impôts ne rentrent pas, et les déficits s'aggravent. Le gouvernement table encore sur 1% de croissance - ce sera moins, disent les experts. Résultat, le déficit budgétaire devrait atteindre cette année 4,4% - pire que l'an passé. Un chiffre encore confidentiel, révélé par Le Point cette semaine, et qui inquiète en plus haut lieu : comment tenir la promesse des baisses d'impôts annoncée juste avant l'été ? Si la communication gouvernementale marque un réel tournant, pour en finir avec le déni, c’est qu’il s’agit sans nul doute de préparer les esprits. Les Français sont prévenus.


Les courtes vacances du gouvernement

Quinze jours de repos, pas plus. Et cette règle désormais en vigueur depuis plusieurs années, depuis la canicule de 2003, qui avait révélé une certaine vacance du pouvoir : ne pas être à plus de deux heures et demie d'avion de Paris.

Le chef de l'Etat donne l'exemple, puisqu'il passera une grande partie de ses congés à vingt minutes de Paris en voiture : à deux pas du Château de Versailles, à La Lanterne, l'ex-résidence des Premiers ministres, tombée dans l'escarcelle du président depuis l'élection de Nicolas Sarkozy. François Hollande ne s'interdira pas quelques sorties, mais on sera loin de la frénésie de l'an passé ; pour faire oublier son premier été présidentiel raté, le chef de l’Etat avait tenu à occuper les écrans tout l'été, en multipliant les déplacements, sans aucun gain dans les sondages.

Manuel Valls, lui, passera l'essentiel de ses vacances sous le soleil de la Provence. Plusieurs ministres ont obtenu des dérogations pour partir plus loin : Christiane Taubira, qui passe ses vacances dans sa Guyane natale, ou encore Laurent Fabius, en Tunisie, mais pour la bonne cause : pour promouvoir le tourisme tunisien.

Quoi qu'il en soit, François Hollande l'a dit à son gouvernement : « Restez mobilisés. Ces vacances sont une pause, mais pas un arrêt. » Retour aux affaires lundi 18 août, avant le Conseil des ministres d'une rentrée qui s'annonce - on l'aura bien compris - compliquée.

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