De notre envoyé spécial à Ajaccio, Guilhem Delteil
« La violence est une impasse », a dit d'emblée le ministre de l'Intérieur, condamnant les tirs qui ont touché une caserne de gendarmerie de Bastia la nuit dernière. Une impasse que le gouvernement « combat et combattra avec force », a-t-il assuré, dans un territoire où le taux d'homicides par habitant est cinq fois supérieur à la moyenne nationale.
« Cette criminalité particulière menace en outre le développement de l'île, selon M. Cazeneuve. Ces clans cherchent en effet à s'accaparer des intérêts économiques. Ils veulent imposer leurs règles aux populations. Notre premier devoir est de contrarier les desseins de ces bandes criminelles, sans trêve ni pause. »
Bernard Cazeneuve a rappelé les renforts de police et de gendarmerie décidés par son prédécesseur, Manuel Valls. Voilà pour le discours consensuel. Viennent ensuite les sujets qui fâchent. « Si l'on aime la Corse, si l'on aime la République et la Corse ensemble, on doit à ses élus amis la sincérité d'un discours », assure le ministre.
Parlant des réformes institutionnelles voulues par les élus corses, Bernard Cazeneuve s'est dit ouvert à un débat sur l'inscription de l'île dans la Constitution pour pérenniser son statut particulier de collectivité territoriale. En revanche, il a rejeté le statut de résident, qui interdit à une personne n'habitant pas l'île d'y acheter un logement. Il le juge contraire au principe d'égalité.
Un retour aux sources... lointaines
Bernard Cazeneuve l’assure. Grâce à son arrière grand-mère corse, il aime profondément cette île. Il n’a d’ailleurs pas résisté au plaisir d’un passage dans le village de son aïeule.
« Ce village de Cognocoli, campé sur un flan de montagne, avec une beauté exceptionnelle de site et de nature m’a enfin convaincu que la madeleine de Proust n’était pas une légende », a-t-il déclamé, lyrique.
A Cognocoli, Bernard Cazeneuve dit avoir retrouvé les émotions de son enfance. Une petite touche personnelle pour mieux le rattacher à cette île. Et pour donner plus de force à ces messages de fermeté qui ont accompagné son satisfecit sur la baisse des homicides.
« Il y a encore trop de violence et je reste déterminé à approfondir ces résultats et à apporter aux Corses la sécurité, à laquelle, légitimement, ils aspirent », a déclaré le ministre.
Mais la détermination du ministre ne s’est pas mesurée aux annonces faites. Pas de moyen supplémentaire pour des forces qui se disent en sous-effectif et mal équipées. Le ministre de l’Intérieur a surtout parlé d’efficacité à accroître, de coopération renforcée entre la police et la gendarmerie, tout en se gardant bien d’évoquer la fusion de ces forces. Elle avait été voulue par son prédécesseur, Manuel Valls, mais ce projet avait relancé la guerre des polices dans l’île.
→ À (RE)LIRE : Première visite de Bernard Cazeneuve en Corse