Ces dernières semaines, le nom de Ségolène Royal s’était imposé pour beaucoup de socialistes comme une évidence. Royal, c’est le poids de l’ex-candidate à la présidentielle. C’est aussi l’expérience : elle a été trois fois ministre - de l’Environnement, déjà, sous Mitterrand en 1992-1993, de l’Enseignement (1997-2000), puis de la Famille (2000 - 2002) au sein du gouvernement de Lionel Jospin. Surtout, un obstacle de taille à son retour n'existe plus depuis janvier : Valérie Trierweiler. Au départ de l’ancienne « première dame », l’un des proches de Ségolène Royal confiait que « la fatwa est levée ». C’est une revanche pour l'ancienne compagne du chef de l'État, qui revient de loin.
La double défaite politique
Politiquement, Ségolène Royal reste en effet sur une double défaite : à la primaire socialiste puis aux législatives. A la primaire, elle n’avait jamais réussi à retrouver l'engouement dont elle avait fait l'objet pendant la campagne présidentielle de 2007. Résultat, seulement 7 % des suffrages s’étaient portés sur son nom. On se souvient de ses larmes, ce soir-là. Quelques mois plus tard, avant même d'être élue députée, Ségolène Royal se voyait déjà présidente de l'Assemblée nationale, quatrième personnage de l'État. Nouvel échec cuisant : elle est sèchement battue par le socialiste dissident Olivier Falorni, soutenu Valérie Trierweiler. Royal n’a donc pas participé au grand retour de la gauche aux affaires.
Après 21 mois de traversée du désert, l'ancienne candidate à la présidentielle revient dans le jeu pour son plus grand plaisir. Avec Ségolène Royal, c’est une personnalité à part sur l’échiquier socialiste qui fait son entrée au gouvernement. Une personnalité atypique dont la parole compte au sein de la majorité.
« Lier les discours aux actes »
« J'en suis très honorée et en même temps je connais l'exigence que cela appelle dans un ministère majeur pour le redressement du pays et les créations d'emplois qui vont avec », a déclaré Ségolène Royal, quelques minutes après l’annonce de sa nomination. Rappelant qu’elle a « déjà été ministre de l'Environnement », et a mis en avant son bilan au niveau régional. « Un travail au quotidien pour l'écologie, le développement durable, pour l'énergie qui a fait de Poitou-Charentes une des régions les plus en avance sur ce terrain là ». Pour celle qui est désormais en troisième position du gouvernement, « ce qui est important, c'est de lier les discours aux actes ».
Connue pour ses prises de position singulières, certains se demandent cependant aujourd'hui si elle parviendra à jouer collectif. Mais pour Phillippe Martin, cela ne fait pas de doute. Son prédécesseur au ministère lui a rendu ce mercredi un hommage appuyé : « votre stature, votre histoire, votre voix, et l'écho que celle-ci a et aura auprès du peuple, est un atout pour l'écologie. »
Si sa nomination a été bien accueillie par les défenseurs de l'environnement, les écologistes se disent eux inquiets pour l'avenir de la fiscalité écologiste. Et pour cause, Ségolène Royal s'était notamment prononcée par le passé contre la contribution énergie-climat et conter la taxe carbone.
Faire de l'écologie une priorité du nouveau gouvernement, une gageure pour Ségolène Royal
Ségolène Royal souhaitait le ministère de l'Ecologie et de la Transition énergétique, ses vœux sont donc partiellement exaucés. L'énergie reste bien connectée au ministère de l'Écologie, mais sans mentionner la transition énergétique.
Il est vrai que débat sur la transition énergétique qui s'est déroulé fin 2013 a débouché sur un projet de loi qui ne satisfait aucune des ONG qui y ont participé. Le 25 février dernier, le Sénat adoptait une résolution centrée sur le prolongement de la durée de vie des réacteurs nucléaires actuels. L'engagement de François Hollande de fermer la centrale de Fessenheim d'ici 2015 et de réduire la part du nucléaire de 50% dans la production électrique française d'ici 2025, pourraient donc être rangé au placard. Et pour compléter le tableau, rappelons qu'Arnaud Montebourg, ministre de l'Économie, faisait récemment l'apologie de l'extraction «propre» du gaz de schiste. Alors, au lendemain de la sortie du rapport du GIEC, qui montre que le réchauffement climatique fait courir des risques graves à l'ensemble de la planète, Ségolène Royal devra être convaincante, au sein du gouvernement français, pour arriver à faire passer l'écologie comme une priorité.
Rappelons que Paris accueillera en 2015 la 21e conférence sur le Climat (COP 21), qui devra aboutir à un nouvel accord international visant à limiter le réchauffement climatique. Un enjeu de taille pour Ségolène Royal.