La loi « Florange », c'est l'obligation pour les dirigeants d'entreprises de plus de 1000 salariés qui veulent se séparer d'un établissement à rechercher un repreneur pendant 3 mois, plutôt que de fermer le site sans autre forme de procès. Cela, le Conseil constitutionnel le juge conforme à la Constitution. C'est le principe de la sanction en cas de manquement que les sages ont censuré. Le texte prévoyait en effet que les propriétaires d'entreprises pouvaient être condamnés à des pénalités, dans la limite de 2 % du chiffre d'affaires. Les membres du Conseil jugent que l'obligation pour un employeur d'accepter une offre de reprise sérieuse, ainsi que la compétence confiée au tribunal de commerce pour l'apprécier, avec des sanctions à la clé, constituent une atteinte au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre.
La loi vidée de son contenu
Sans caractère coercitif, la loi est donc tout simplement vidée de sa substance. Il suffira en effet à l'employeur d'avoir fait mine de chercher un repreneur avant d'entériner sa décision. Au final, il ne sera pas obligé de céder ses installations et pourra restructurer son activité à sa guise, sans craindre de voir arriver et de renforcer un concurrent. Exactement ce qu'a fait ArcelorMittal, propriétaire des hauts fourneaux de Florange, qui sont déjà arrêtés.
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Pour le candidat Hollande, c'était l’une des images symboles d’un homme portant les valeurs de la gauche en campagne présidentielle : hissé par les ouvriers de Florange sur un camion, François Hollande haranguant les « gueules noires » à cran, inquiètes pour leur avenir. Cette image, déjà largement écornée, vient donc de prendre un nouveau coup. Quant à la ville de Florange, elle a déjà acté sa déception : dimanche dernier le maire socialiste de la ville a été balayé dès le premier tour. Florange, en quelques heures, est passée à droite.
Une décision à fort impact politique
Cette censure du Conseil constitutionnel est peut-être en revanche le dernier coup de pouce qu’attendait le candidat FN dans la ville voisine d’Hayange, elle aussi
marquée par la fin de la sidérurgie, où il est arrivé en tête, dimanche dernier, à plus de 30 %. Cette décision ne devrait pas non plus rendre service aux candidats socialistes qui tentent d’atténuer la sanction de dimanche dernier. Selon un sondage rendu public mercredi, 87 % des Français souhaitent en effet un changement de politique économique.
Edouard Martin, syndicaliste CFDT, fer de lance dans le combat sur Florange et désormais candidat sur une liste socialiste aux élections européennes, a réagi à cette annonce sur Europe 1. « Voilà une loi qui, malgré tout ce que l’on pouvait dire, amenait quand même un minimum de protection supplémentaire pour les travailleurs qui voyaient le risque de voir leur entreprise fermer, et voilà que ça a été retoqué, jugé illégal », se lamente le syndicaliste passé à la politique. Interpellant les 108 sénateurs et 80 députés UMP qui avaient saisi le Conseil constitutionnel après l'adoption définitive de la loi par le Parlement, le 24 février, il demande que « ceux qui ont eu recours au Conseil constitutionnel s’expliquent. (…) A quel moment ces gens-là ont pensé à l’intérêt général quand ils ont eu recours au Conseil constitutionnel, sinon d’avoir une posture politicienne et tacticienne ? »
« C’est ce qu’il se passe quand on fait des lois idéologiques, des lois-gadget, qui n’ont rien à voir avec la réalité économique », a pour sa part jugé de son côté Jean-François Copé, président de l’UMP, interrogé par RFI. Evoquant une « loi absurde » et une décision des Sages qui « montre une nouvelle fois l’incompétence de ce gouvernement », Jean-François Copé estime que « le Conseil constitutionnel a censuré ce qui n’était rien d’autre qu’une promesse électorale de François Hollande qui avait abusé un certain nombre de Français – pas tous – en leur faisant croire que l’on pouvait réguler une économie en obligeant une entreprise en difficulté à vendre uniquement si elle trouvait un repreneur et même à prévoir des sanctions. »