Remaniement ministériel en France: Hollande réfléchit...

Les ministres du gouvernement français étaient nombreux, mercredi à l'Elysée, à se demander s'ils n'assistaient pas à leur dernier conseil et si leur chef, Jean-Marc Ayrault, serait au même poste la semaine suivante.

Jean-Marc Ayrault est le premier visé après la gifle électorale de dimanche dernier. Dans la majorité, tout le monde a en tête son visage, blanc comme un linge, au moment de commenter les résultats sur les chaînes télévisées dimanche soir. Le socialiste Malek Boutih, qui n'a jamais caché qu'il le juge mauvais aux commandes de Matignon, parle même du Premier ministre au passé.

Manuel Valls au tournant

Les potentiels successeurs s'agitent, Manuel Valls au premier chef. Il veut montrer plus que jamais qu'il est utile. Le ministre de l'Intérieur est en déplacement dans deux villes ce jeudi, manière de souligner qu'il prend, lui, sa part dans le combat électoral pour corriger la sanction de dimanche dernier. Le locataire de la place Beauvau reste cependant très silencieux : pas question pour lui de faire la moindre faute car le vent souffle en sa faveur, estime-t-il. Le score du Front national lors du premier tour des municipales montrerait une demande d'autorité de la part des Français, le trait d'image le plus fort de Manuel Valls. Pourtant, cela ne suffit pas, loin de là, à le rendre incontournable. D'autant que le très ambitieux ministre a un gros caillou dans sa chaussure : Europe Ecologie-Les Verts. Les écologistes rappellent sans cesse qu'ils ont un problème politique avec Manuel Valls : sa ligne économique, qu'ils jugent trop libérale et ses valeurs sociétales trop droitières à leur goût.

Duflot prête à quitter la barque

On se souvient notamment du clash avec Cécile Duflot au sujet des Roms. L'automne dernier, la ministre du Logement avait jugé que des déclarations de Manuel Valls allaient
« au-delà de ce qui met en danger le pacte républicain ». En plus de ces profonds désaccords, les écologistes ont une autre grille de lecture de la situation politique. Pour l'ex-patronne des écologistes, si « le FN grimpe, c'est du fait de la désespérance économique et sociale et non de l'insécurité ou de l'immigration ». Bref, la nomination de Manuel Valls n'est pas, à leurs yeux, une réponse au vote de dimanche.

Manuel Valls a bien déjeûné avec Cécile Duflot, il y a deux jours, pour tenter d'aplanir leurs désaccords. Peine perdue. « Si tu es nommé, je m'en vais », a-t-elle dit à son collègue de l'Intérieur. Et Cécile Duflot sait qu'elle peut désormais se permettre cette menace. Depuis dimanche dernier, les écologistes ne pèsent plus les 2 % du score d'Eva Joly à la présidentielle, mais les 9 % de leurs résultats aux municipales.

Hollande passe ses troupes en revue

Quant au président de la République, il prend plaisir, dit-on au gouvernement, à laisser le suspense durer, à passer les hypothèses pour Matignon en revue. Laurent Fabius, par exemple : le ministre des Affaires étrangères est redevenu populaire, solide à son poste. Problème : il était déjà Premier ministre il y a 30 ans. Ce qui ferait un peu « retour vers le futur », moque un député. François Hollande pourrait aussi garder Jean-Marc Ayrault, bien sûr. Il lui reproche son manque d'autorité et sa discrétion, mais Jean-Marc Ayrault semble décidé à ne pas se laisser faire. Mercredi après-midi, tous ses proches sont montés en première ligne pour le défendre avec les arguments suivants : lui seul peut réunir toutes les composantes de la majorité ; c'est lui qui porte le Pacte de responsabilité, réforme majeure pour le président ; enfin, il est loyal et ne vise pas d'autre poste.

Tension dans l'air des ministères

Si le sujet Matignon semble loin d'être tranché, en revanche, le gouvernement n'en sortira pas indemne. Laurent Fabius, encore lui, plaidait ce jeudi matin pour une équipe concentrée à 15 ou 20 ministres. Ils sont 38 aujourd'hui. Le pôle Bercy (Economie et Finances) figure tout spécialement dans l'oeil du cyclone. Il n'existe personne aujourd'hui dans la majorité pour défendre l'efficacité de l'équipe actuelle. Et d'ailleurs, à Bercy, tout le monde fait ses valises. Si l'on en croit, du moins, ce courriel révélé par le journal L'Express mercredi. Un message envoyé aux cabinets des ministres et intitulé « votre départ », accompagné d'un texte expliquant comment ranger ses cartons et ses notes.

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