Bernard Tapie en garde à vue à l'hôpital de l'Hôtel-Dieu à Paris

Son audition était très attendue : Bernard Tapie a été placé en garde à vue ce lundi matin à Paris. L'homme d'affaire devait s'expliquer sur l'arbitrage controversé qui lui a permis d'empocher plus de 400 millions d'euros en 2008, en règlement du litige avec le Crédit Lyonnais. La garde à vue se déroule à l'hôpital de l'Hôtel-Dieu, à Paris.

« Je ne suis pas inquiet, je me demande bien ce qu'ils peuvent trouver ! »,  a affirmé ce matin Bernard Tapie sur l'antenne d'Europe 1. Le sulfureux homme d'affaire est donc fidèle à sa réputation : bravache, jusqu'au bout. Pourtant, dès le début de sa garde à vue, Bernard Tapie a été victime d'un malaise : direction l'Hôtel-Dieu, un célèbre hôpital parisien.

Il est vrai que dans ce dossier, les éléments pouvant entamer la sérénité de Bernard Tapie ne manquent pas. Les enquêteurs semblent avoir de quoi démontrer l'escroquerie en bande organisée. A ce jour, trois personnes ont été mises en examen pour ce chef : il y a d'abord Pierre Estoup, le juge arbitre, Stéphane Richard, le PDG d'Orange, ancien bras droit de Christine Lagarde à Bercy et Jean-François Rocchi, l'ancien président du Consortium de réalisation, en quelque sorte « la poubelle du Lyonnais ».

Les révélations se multiplient. L'ancien magistrat Pierre Estoup, l'architecte de l'arbitrage aurait oeuvré pour le clan Tapie. La brigade financière doit interroger Bernard Tapie sur ses multiples rendez-vous avec Nicolas Sarkozy en 2007. S'il est placé en garde à vue à l'issue de cette garde à vue, l'homme d'affaire peut s'attendre à devoir verser une caution à la hauteur des 403 millions d'euros qu'il a touché et ses biens peuvent être placés sous séquestre. De quoi effectivement donner quelques sueurs froides à Bernard Tapie.

2007, une année clé

La date clé de l'affaire semble être une réunion tenue fin juillet 2007 à l'Elysée. Une réunion à laquelle aurait participé Claude Guéant, principal collaborateur de Nicolas Sarkozy, en présence de François Pérol, secrétaire général adjoint, de Jean-François Rocchi, de Patrick Ouart conseiller justice de l'Elysée, mais également de Bernard Tapie. Lors de cette réunion Claude Guéant aurait tranché : « Nous allons faire l'arbitrage ». C'est ce qu'a rapporté aux enquêteurs Stéphane Richard il y a quinze jours. L'enquête a également montré que Bernard Tapie a eu plusieurs rendez-vous avec Nicolas Sarkozy à l'Elysée en 2007 et 2008.

Cet arbitrage, favorable à l'homme d'affaire et défavorable au Trésor Public qui a dû débourser les 403 millions d'euros, viendrait-il récompenser le soutien appuyé de Bernard Tapie à Nicolas Sarkozy lors de campagne présidentielle de 2007 ? Tapie, dès qu'il sera en mesure de répondre aux enquêteurs, devra aussi s'expliquer sur ses liens avec le juge arbitre Pierre Estoup. Les enquêteurs ont la preuve que les deux hommes se connaissent de longue date. Or un arbitre ne doit théoriquement pas avoir de liens avec les parties avant son arbitrage.

Bernard Tapie, coincé dans l'étau judiciaire

Jean Peyrelevade, ancien dirigeant du Crédit Lyonnais, estime que cet arbitrage est une conspiration. « Personne ne peut plus se mettre en travers de la justice », claironne-t-il ce lundi 24 juin dans le quotidien Les Echos. Il espère désormais une annulation de l'arbitrage. « Cette affaire, précise-t-il, a donné lieu à des manipulations grossières ». « Le saccage des finances publiques par l'Etat lui-même a montré une grande fragilité de la République », ajoute-t-il. Pour l'ancien dirigeant du Crédit Lyonnais, c'est une affaire d'Etat, un vol manifeste, une conspiration. Mais il conclut : « tout a changé depuis quelques semaines ».

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