Officiellement, ils n'étaient encore que quatre, ce lundi 21 août, à briguer la présidence de l’UMP, laquelle se décidera, fin novembre, lors du prochain congrès du parti à l’occasion d’un scrutin à deux tours auquel pourront prendre part les 264 137 adhérents de la formation dont Jean-François Copé est le secrétaire général depuis le 17 novembre 2010. Premier en lice, François Fillon a fait acte de candidature le 1er juillet en qualité de favori, position qu’il occupe toujours aujourd’hui.
Dominique Dord lui a emboîté le pas le 14 juillet, suivi de Nathalie Kosciusko-Morizet une semaine plus tard puis de Bruno Le Maire dimanche dernier 19 août dans cette campagne où l’objectif de certains est déjà la présidentielle de 2017, après une primaire qui, selon toute vraisemblance, aura lieu fin 2016, puisque tout le monde ou presque à l’UMP est tombé d’accord sur le principe. A ces quatre prétendants de calibres différents va automatiquement s’ajouter le nom de Jean-François Copé dont l’annonce officielle est programmée dimanche prochain 26 août. Rien ne dit cependant que le maire de Meaux sera le dernier, même si le temps presse. Les candidats n’ont en effet que jusqu’au 18 septembre pour se déclarer et réunir les 7 924 parrainages émanant d'au moins dix fédérations différentes (soit 3% du nombre total des adhérents UMP) nécessaires à leur inscription sur la liste.
Fillon, en favori
Premier ministre durant l’intégralité du quinquennat de Nicolas Sarkozy, François Fillon (58 ans) jouit d’une stature et d’une légitimité qui font donc de lui le favori logique pour prendre les rênes du parti. Cette position est d’ailleurs largement confirmée par un récent sondage réalisé par l’Ifop et Le Journal du Dimanche auprès des sympathisants UMP qui lui accordaient 48% des suffrages contre seulement 24% à Jean-François Copé. Victime d’un accident de scooter lors de vacances en Italie qui l’a immobilisé une partie de l’été, François Fillon bénéficie de nombreux soutiens d’envergure dans le parti comme par exemple Valérie Pécresse, Eric Ciotti et Laurent Wauquiez, ses lieutenants les plus en vue, qui sont montés au créneau durant son absence forcée. L’ancien locataire de Matignon a prévu d’effectuer sa rentrée politique dimanche prochain 26 août, soit le jour même de l’annonce programmée de la candidature Copé. C’est tout sauf un hasard.
Inconnu du grand public, le député de Savoie Dominique Dord (52 ans) avait succédé à Eric Woerth en qualité de trésorier de l’UMP en 2010, suite aux retombées de l’affaire Bettencourt. S’il s’est lancé au tout début juillet, c’était surtout pour « faire le nombre » au cas où la conquête du parti se serait résumée d’emblée à un choc frontal Fillon-Copé. Lors de l'annonce de sa candidature, il avait déclaré au Figaro qu’il ne voulait pas que la compétition se transforme en « primaire de fait » pour la présidentielle de 2017. « Je crois plutôt qu'il faut désigner quelqu'un qui soit en mesure de redresser les finances du parti et préparer le mécanisme de cette primaire », avait-il ajouté. Bien conscient qu'il n'avait aucune chance d'obtenir la quantité suffisante de parrainages et voyant que d'autres candidats s'étaient déclaré, il a finalement annoncé mardi 22 août qu'il se retirait de la course et qu'il soutiendrait François Fillon.
NKM, la troisième voie
C’est évidemment loin d’être le cas de Nathalie Kosciusko-Morizet, la jeune (39 ans) députée de l’Essonne et ex-ministre de l’Ecologie, du Développement durable, du Logement et des Transports qui a les dents longues et de la suite dans les idées. Celle qui est déjà identifiable par ses seules initiales - NKM - s’est trouvé un slogan astucieux « La France droite » (un prolongement de la « La France forte » et une pique à la « gauche molle ») et elle tient à se poser en alternative au duel Fillon-Copé. Pour marquer sa différence, elle fait clairement des municipales de 2014 l’objectif prioritaire du parti, qualifiant même d’ « absurde » l’organisation centralisée d’une l’UMP déjà trop tournée, selon elle, vers 2017. Reste que la talentueuse NKM manque de soutiens au sein du parti, même si certains – dont Henri Guaino par exemple – ont loué son attitude irréprochable après qu’elle eut pourtant fustigé la campagne trop droitière de Nicolas Sarkozy lors de la présidentielle. Déterminée, elle a fait durant l’été la tournée des plages à bord d’une camionnette – la NKM mobile – pour tenter de rallier les suffrages. Et elle pourrait bien créer la surprise en obtenant les presque 8 000 parrainages requis, ce qui donnerait du piment à la campagne.
De la même génération que NKM, Bruno Le Maire (43 ans) s’est pour sa part déclaré sur le tard puisque son annonce ne date que de dimanche dernier, 19 août. Pour beaucoup, cet ancien directeur de cabinet de Dominique de Villepin devenu, à l’Agriculture, l’un des ministre les plus appréciés des gouvernements Fillon II et Fillon III, représente l’avenir du parti, ce qui signifie, en creux, qu’il lui faudra attendre son tour. Pour le député de l’Eure, il s’agit donc essentiellement de tâter le terrain, étant donné qu’on ne lui prête guère que 2% d’intention de vote et qu’il aura énormément de mal à recueillir suffisamment de parrainages pour concourir, en raison de son départ tardif. En fin analyste, Bruno Le Maire s’est positionné comme « le candidat du renouveau », notant que la droite se trouvait dans une situation « sans précédent depuis 1958 », après avoir « perdu quasiment tous les pouvoirs locaux et nationaux ». Cette posture pourra toujours resservir à un homme d'avenir qui n’a finalement pas grand-chose à perdre dans cette pré-campagne.
Copé, en challenger
Après avoir ménagé durant des mois un vrai-faux suspense, le secrétaire général actuel, Jean-François Copé (48 ans) entrera donc dans la bataille dimanche prochain 26 août lors du rassemblement de son club Génération France à Chateaurenard (Bouches-du-Rhône), où il a prévu de faire son annonce officielle. Ce retard à l’allumage délibéré lui a valu d’être accusé par ses détracteurs de faire campagne avec les moyens du parti mais le maire de Meaux ne s’est pas laissé impressionner. Soutenu par de nombreux poids lourds de l’UMP dont l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, les anciens membres du gouvernement Luc Chatel, Roger Karoutchi, Hervé Novelli ainsi que par le président du groupe UMP à l’Assemblée Christian Jacob, il a été le principal pourfendeur de l’action du gouvernement socialiste durant l’été. Contradicteur habile et pugnace, il a estimé mardi 21 août qu’un débat entre les postulants était « indispensable », une proposition acceptée sur le principe par le camp Fillon qui n’a cependant pas caché son agacement d’être pratiquement mis devant le fait accompli. Le débat en question pourrait avoir lieu à la mi-octobre et le camp Copé espère bien entendu que la passe d’armes permettra à son favori de refaire son retard supposé sur François Fillon.
Si les postulants sont cinq pour le moment, il n’est pas exclu qu’une autre, voire plusieurs candidatures viennent s’ajouter à la liste avant la date-butoir du 18 septembre. Le maire de Nice Christian Estrosi (57 ans) revendique ainsi 3 000 parrainages et entretient toujours le mystère sur ses intentions, de même que François Baroin (47 ans) qui semble avoir du mal à trancher entre son ami Copé et un Fillon qu’il respecte. Prédécesseur de Jean-François Copé au poste de secrétaire général, Xavier Bertrand (47 ans) pourrait créer la surprise au dernier moment, lui qui n’a pas encore annoncé ses intentions mais qui pourrait bien avoir dans la manche le nombre de parrainages nécessaires. Au cas où le débat fratricide dégénérerait, Alain Juppé (66 ans) n’a pas exclu de se poser en garant du parti avec, à son crédit, l’avantage de ne pas lorgner sur 2017. A ce sujet, les uns et les autres n’auront pas manqué de remarquer que 53% des sympathisants UMP voudraient que Nicolas Sarkozy (57 ans) soit le candidat de la droite à la présidentielle dans cinq ans, selon le sondage IFOP-LeJDD publié dimanche 19 août, un score qui a surpris nombre d’observateurs.