A Lille, à Villeurbanne, comme à Paris et dans sa banlieue, ces derniers jours quelques centaines de Roms parmi lesquels des dizaines d’enfants ont été évacuées de leurs camps avant que les forces ne les démantèlent. Jeudi, le 9 août, 240 Roms de Roumanie bénéficiaires de l’aide au retour ont quitté Lyon à bord d’un charter pour Bucarest. « C’est une expulsion déguisée » ont aussitôt dénoncé les associations de défense des Roms qui accusent les autorités de « dilapider ainsi l’argent public, car beaucoup vont revenir » assurent-elles.
Les critiques de ces actions ne viennent plus seulement des ONG. Aussi choqué, le partenaire privilégié du Parti socialiste au gouvernement, Europe Ecologie-Les Verts (EELV) y est allé lui aussi de sa critique. Sans détour, le parti écologiste parle de « contradiction brutale d’une des promesses » de François Hollande qui s'était engagé durant la campagne « à ne pas expulser de familles Roms sans leur apporter de proposition de relogement ». Dans son communiqué, EELV demande notamment au gouvernement Ayrault « de stopper immédiatement ces évacuations sans solutions ».
« Chasse aux Roms »
Même le Front national n’a pas tardé à se faufiler dans la brèche. Pour sa présidente, Marine Le Pen, les opérations d’évacuation comme les expulsions « ne mènent à rien », dit-elle. Le point commun s’arrêtant là avec les ONG ou les écologistes. Pour le reste, le Front national continue de privilégier « la maîtrise des frontières ».
Le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) dénonce de son côté une « chasse aux Roms » qui se poursuit « dans la plus sordide des traditions sarkoziennes » peut-on lire dans un communiqué intitulé « Valls à la manoeuve, la chasse aux Roms continue ». Autre coup de griffe bien appuyé de la part du Parti de gauche qui s’élève lui aussi contre la politique de ses alliés socialistes. « Je préfèrerais que le gouvernement applique avec une grande rigueur une politique contre les licenciements plutôt que de se mettre dans les pas du gouvernement précédent… » a commenté Eric Coquerel le secrétaire national de cette formation créée par Jean-Luc Mélenchon.
Incompréhension et déception
Malgré ces attaques, au gouvernement, on reste « droit dans se bottes ». Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls justifie la poursuite de la politique des évacuations engagées par Nicolas Sarkozy par les risques sanitaires encourus mais aussi par les tensions avec les riverains. Tout en maintenant des propos fermes, Manuel Valls rappelle que des consignes de « concertation » ont été données aux préfets afin de proposer, en accord avec les élus locaux et les associations, des solutions de relogement notamment pour les plus fragiles, enfants et femmes enceintes.
Cela dit, l’incompréhension et la déception des militants associatifs ne sont pas pour autant atténuées. Ils rappellent d’ailleurs que ces évacuations poursuivies par le gouvernement socialiste sont en contradiction avec les principes du Conseil de l’Europe lequel a déjà condamné la France pour ces motifs en novembre 2011. Ce 10 août 2012, la Commission européenne a d’ailleurs indiqué qu’elle suivait de près la manière dont les autorités françaises procèdent envers les Roms. Bruxelles veut ainsi s’assurer, indique un porte-parole, du respect des garanties contre les traitements discriminatoires.
En France, on dénombre environ 15 000 Roms qui y vivent depuis une vingtaine d’années. Leur nombre est constant malgré les expulsions, remarque l’association Médecins du Monde, car les personnes reconduites dans leur pays d’origine reviennent systématiquement. Chaque candidat au retour touche 300 euros pour un adulte et 150 euros pour un enfant.