France: la rigueur de gauche pour ramener le déficit public à un niveau acceptable

Le gouvernement a présenté ce mercredi 4 juillet en Conseil des ministres son projet de loi de finances rectificative. C'est-à-dire, les efforts à faire dans l'immédiat pour ramener le déficit public à 4,5% du Produit intérieur brut en 2012, comme l'équipe précédente s'y est engagée.

C'est le premier acte concret du gouvernement Ayrault en matière budgétaire. Même si le Premier ministre a réfuté l’idée d’un tournant de la rigueur mardi 3 juillet devant le Parlement, c'est pourtant bien une politique d’économies que son équipe s'apprête à faire dans les pas de l'équipe Fillon.

Selon Hélène Baudchon, analyste à la BNP Paribas, « C’est plus une rigueur dans la continuité (...) On reste dans un processus de consolidation des finances publiques. Les moyens changent un petit peu. On a beaucoup entendu parler de hausses d’impôts. On commence à entendre parler de maîtrise, voire de baisse des dépenses publiques ».

La difficulté pour le nouveau pouvoir socialiste, c’est de faire des économies sans compromettre une croissance chancelante. Hier, dans son discours de politique générale, Jean-Marc Ayrault a d'ailleurs revu à la baisse la croissance pour 2012 à seulement 0,3%.

C'est un exercice d'équilibriste qui attend donc le gouvernement selon Jean-Dominique Lafay, professeur à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. « Cette croissance est nécessaire, surtout elle ne peut pas résulter d’une stimulation budgétaire, et c’est ça le vrai problème. Si on réduit les dépenses, ce sera un facteur de ralentissement, si on augmente les impôts, ce sera un facteur de ralentissement. Et il faut le faire. Alors comment peut-on trouver une solution ? Il faut que les relais de croissance passent par une stimulation du secteur privé. La croissance ne peut pas passer comme dans les périodes de politiques budgétaires keynésiennes par des déséquilibres budgétaires ».

Des impôts indolores pour la croissance

Cette nécessité est visiblement bien comprise à Matignon qui n'a pas un seul instant évoqué de plan de relance au niveau national, alors qu’au niveau européen, François Hollande a promu l’idée d’une relance via les fonds traditionnellement dédiés aux régions. En revanche, dans le collectif budgétaire, il est bien question de hausse des prélèvements.

Pour éviter de tuer la source de recettes futures, le gouvernement a veillé à ce que ces hausses n'impactent pas l'activité économique. C'est le cas pour la hausse des droits de succession, de l'ISF ou encore d'un éventuel impôt sur les dividendes. C'est aussi le cas pour les nouveaux impôts qui affecteront les sociétés.

 Selon Hélène Baudchon « c’est assez logique en soi, d’aller chercher l’argent où il y en a. D’où l’idée d’aller taxer plus les catégories les plus aisées, de taxer également plus les institutions financières, les compagnies pétrolières qui dégagent effectivement des profits aujourd’hui importants. Le risque est de ne pas aller trop loin ».

La fin de l’ère Sarkozy

La technique du saupoudrage des taxes a la faveur de Bercy et de Matignon. On évite ainsi une forte secousse au tissu économique. Par ailleurs, politiquement, cela passe mieux que la hausse de la TVA ou de la CSG, prônée lundi par la Cour des comptes.

Politiquement toujours, cette série de créations ou de hausses d’impôts efface définitivement la séquence de baisse ouverte par le président Sarkozy. Même l’exonération des charges sociales sur les heures supplémentaires est amenée à disparaître.

Augmenter les impôts, pour trouver les 7,5 milliards manquants pour boucler le budget 2012 est la voie essentielle choisie par Jean-Marc Ayrault. Quant à la réduction des dépenses vivement recommandée par Didier Migaud, le président de la Cour des comptes, lors de la présentation de l’audit des comptes publics, elle n’est pas encore tout à fait d’actualité.

La baisse des dépenses, encore un effort

Dans l’immédiat, pour la loi de finances rectificative présentée ce mercredi, le gouvernement se contente de geler un milliard de dépenses prévues. À l’avenir, des mesures drastiques d’économies seront appliquées à la masse salariale des fonctionnaires qui est, rappelle Jean-Dominique Lafay, la plus importante en pourcentage du PIB après celle du Danemark au niveau européen.

La France a plus de fonctionnaires par habitant que ses voisins allemands, italiens et britanniques. « Ce n’est pas facile de limiter les salaires », reconnaît Jean-Dominique Lafay, même s’il est persuadé que les efforts fournis par les maillons faibles de la zone euro peuvent avoir un effet convaincant sur l’opinion publique française.

Mais ce chapitre sera surtout discuté à la rentrée, lorsque le gouvernement présentera son premier budget de la législature. Il faudra alors tailler dans le vif pour atteindre l’objectif d’un déficit maximum à 3% du Produit intérieur brut.

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