Chez les socialistes, le ton a été bien vite donné : les ministres qui ne seront pas élus députés, perdront leur portefeuille. Courageux mais point téméraires, une dizaine de ministres du gouvernement de Jean-Marc Ayrault a préféré renoncer… Mieux vaut tenir que courir, la maxime est plus que jamais d’actualité. Mais pour les vingt-six qui, malgré tout, ont décidé de relever le défi, quatre jouent gros. Ainsi Marie-Arlette Carlotti, toute nouvelle ministre déléguée aux Personnes handicapées candidate à Marseille où elle aura fort à faire face à Renaud Muselier, le chef de l’UMP locale.
Rien n’est gagné non plus pour Aurélie Filippetti, détentrice du portefeuille de la Culture et de la Communication et députée sortante qui risque de mordre la poussière face à un UMP dans la première circonscription à Metz où un nouveau redécoupage lui est défavorable. Ce ne sera pas facile non plus pour Benoît Hamon, ministre délégué à l’Economie solidaire qui affronte le député UMP sortant, Jean-Michel Fourgous, à Trappes dans les Yvelines.
L’ombre de Fillon
La candidature de Stéphane Le Foll, le ministre de l’Agriculture qui se présente dans la Sarthe, à Sablé, sur les terres de François Fillon comporte aussi quelque risque. Déjà en 2002 comme en 2007, Stéphane Le Foll avait perdu face à François Fillon dès le premier tour. Mais l’ancien Premier ministre ayant renoncé à son fief pour Paris, Le Foll affrontera cette fois Marc Joulaud, le député-maire sortant UMP de Sablé dans une circonscription acquise à la droite depuis 1958…
Dans l’ancienne majorité, la bataille ne ressemble pas non plus à un long fleuve tranquille pour tout le monde. Ainsi, Jean-François Copé, le patron de l’UMP, a-t-il du souci à se faire chez lui à Meaux, dans la Seine-et-Marne où on disait jusque-là sa position imprenable. Mais le député sortant aura fort à faire en cas de triangulaire avec Marie-Christine Arnautu, la vice-présidente du Front national et la candidate EELV soutenue par le PS, Caroline Pinet.
Autre tête d’affiche de l’UMP, Nathalie Kosciusko-Morizet n’est pas non plus assurée de l’emporter dans la 4e circonscription de l’Essonne où elle brigue un second mandat. Son adversaire socialiste Olivier Thomas fait jeu égal avec l’ancienne ministre de l’Ecologie en recueillant 50% des intentions de vote après un premier tour que dominerait Nathalie Kosciusko-Morizet (41%) contre 33% pour son rival PS.
Redoutables triangulaires
A Toul dans la 5e circonscription de Meurthe-et-Moselle, c’est l’ex-ministre de l’Apprentissage Nadine Morano, pourtant favorite au premier tour, qui risque bien de mordre la poussière en cas de triangulaire au second tour avec le Front national et le Parti socialiste. Le parti de Marine le Pen avait obtenu 24% des voix lors de la présidentielle. Pour les législatives, estime un politologue, il suffit que seules les deux tiers de ces voix aillent au candidat frontiste, Olivier Prugneau, pour que celui-ci se maintienne au second tour et s'immisce entre l'UMP et le socialiste.
Dans le nord de la France, ce sont deux chefs qui s’affrontent à Hénin-Beaumont dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais. Partie la fleur au fusil, Marine Le Pen la présidente du Front national, a trouvé en travers de son chemin Jean-Luc Mélenchon du Front de gauche. Bien décidé à en découdre, le tonitruant patron de la gauche radicale veut sa revanche sur la présidentielle où Marine Le Pen l’a nettement devancé. Une éventualité appuyée par un sondage Ifop qui place Marine Le Pen en tête du premier tour avec 29% des voix mais donne Jean-Luc Mélenchon vainqueur au second tour avec 55%.
Dans le sud, François Bayrou candidat dans la 2e circonscription des Pyrénées-Atlantiques est donné battu selon un sondage OpinionWay et cela quelle que soit la configuration. Dès le premier tour, le patron du MoDem serait devancé par la socialiste Nathalie Chabanne (30% contre 24%) alors que Eric Saubatte, le candidat de l’UMP, est crédité de 23% d’intentions de vote, menaçant même la deuxième place de François Bayrou. Au second tour, en cas de tête à tête avec la socialiste, le patron du MoDem qui est arrivé 5e de la présidentielle est vaincu avec 45% et il ne totalise plus que 28% si une triangulaire se confirme.
Fratricide combat
Autre situation qui ne fait pas l’unanimité localement, l’arrivée à La Rochelle de Ségolène Royal. L’ex-candidate à la présidentielle, après avoir laissé sa circonscription d’origine à Delphine Batho, devra battre Olivier Forlani, l’ancien patron du PS de Charente-Maritime débarqué pour laisser la place à la prétendante au « perchoir » de l’Assemblée nationale. La lutte fratricide s’annonce féroce. Le tout se jouant sous l’œil goguenard de la droite qui, au deuxième tour, pourrait ne pas rechigner à appeler à voter pour Forlani, histoire de favoriser le candidat « ancré sur le territoire » plutôt que la candidate « vue à la télé ».
On peut relever aussi par contraste au moins deux exemples de députés sortants qui, malgré des affaires embarrassantes, pourraient malgré tout conserver leur siège de député. C’est le cas d’Eric Woerth ancien ministre du Travail, mis en examen dans le cadre de l’affaire Bettencourt qui de plus est l’objet d’une enquête de la Cour de justice de la République pour prise illégale d'intérêts dans l'affaire de la vente de l'hippodrome de Compiègne.
Quant à Georges Tron, député-maire de Draveil et candidat dans la 9e circonscription de l’Essonne, il est mis en examen pour viols et agressions sexuelles en réunion et par personne ayant autorité. L’ancien secrétaire d’Etat à la Fonction publique se dit victime d’un complot mais affiche un optimisme tranquille quant à se réélection. Cela dit, l’exaspération de ses concitoyens lassés du rappel constant et gênant des ennuis de Georges Tron, pourrait les conduire à tirer un trait.