En marge de la déclaration de candidature de Nicolas Sarkozy, les équipes du président français ont déjà mis en ligne depuis vendredi matin sa nouvelle page Facebook. Un exercice de communication anecdotique mais réussi, puisque 13 000 utilisateurs se sont illico abonnés à son nouveau profil. Bien loin des 500 000 personnes qui « aiment » sa page précédente, une simple page « fan », mais quand même de bon augure face aux 51 000 personnes qui suivent son concurrent François Hollande sur le réseau social californien.
La nouvelle page, fondée sur le principe du « journal » (déjà utilisé par de nombreux utilisateurs lambda depuis son lancement en décembre dernier), est celle d’un président « normal », comme dirait M. Hollande. Exit la posture décontractée en photo de profil (chemisette blanche avec la mer en toile de fond). Place désormais à un portrait quasi-officiel, pris sur le perron de l’Elysée devant la Garde républicaine.
Une citation toute chiraquienne orne le tout : « J’éprouve depuis le plus jeune âge la fierté d’appartenir à une grande, vieille et belle nation : la France ».
Utilisation raillée de la « Timeline »
Nicolas Sarkozy reste néanmoins lui-même. Depuis son élection, il aime parler de son mandat comme d’un « job ». Cela tombe bien : Facebook permet aux utilisateurs d’indiquer l’entreprise qui les emploie. « A propos de Nicolas », il est donc précisé qu'il « travaille à : Présidence de la République française ».
Côté culture, Nicolas Sarkozy donne à voir ce qu’il veut bien dévoiler. On le croyait fan d’Albert Cohen, dont l’un des personnages a donné son nom à son petit-fils Solal. Lui préfère mettre en avant, outre Sándor Márai et son best-seller « Les Braises » (dont l’action se déroule dans un château de Hongrie), quelques livres récents auréolés des prix littéraires classiques (Renaudot, Goncourt, prix du roman Fnac). Peu de prises de risques.
Idem pour les films : « Vas, vis et deviens », « Une séparation », mais aussi « Des Hommes et des Dieux », « Intouchables » et « The Artist », pour bien coller à l’actualité. Pas de trace du cinéma italien dont parlait encore Nicolas Sarkozy, il y a peu, devant ses visiteurs.
L'aspect de cette page internet qui a le plus retenu l’attention ces derniers jours est incontestablement l’usage fait par le président et ses équipes de la « timeline », principale innovation technique du nouveau système de Facebook.
Choix sélectifs sur les éléments biographiques
La « timeline » permet aux internautes de revisiter non plus seulement les dernières actualités d'un utilisateur (ses derniers commentaires, liens, photos, etc.) mais désormais toute sa vie. Pour l'homme politique qu'est Nicolas Sarkozy, il s'agit d'une rétrospective à la fois publique et privée, sur le mode du « storytelling ». Un parcours professionnel hors norme que tout un chacun peut revisiter grâce à des photos d’archives et des vidéos piochées sur le site de l’INA.
On y trouve des dates professionnelles clés, des naissances chez les Sarkozy (pas de mariage en revanche), des éléments chiffrés de bilan (au ministère de l'Intérieur principalement), mais aussi des ralliements politiques importants dans sa carrière (Chirac), accompagnés de commentaires et de citations de Nicolas Sarkozy lui-même pour donner du corps à l'ensemble.
De sa naissance jusqu’au sacre du 6 mai 2007, en passant par le sauvetage des écoliers de Neuilly en 1993, son passage place Beauveau et la période de « conquête » de l'UMP puis de l'Etat, tout y passe, donc. Jusqu'à aujourd'hui. Sauf ce sur quoi Nicolas Sarkozy souhaite éviter de s’appesantir. Et c'est là que le bât blesse : certains oublis ont suscité quelques railleries ci-et-là, notamment sur le site d'information en ligne Owni.
Exemple : le président confirme qu'il était président du Comité de soutien des jeunes à la candidature de Chirac en 1981, mais il n’est mentionné nulle part qu’il fut aussi porte-parole de la campagne d’Edouard Balladur en 1995 (campagne désormais frappée par la suspicion dans le volet financier de l’affaire Karachi). D’ailleurs, en 1995, il ne se passe rien dans sa vie selon sa page Facebook. Pas une ligne, entre un passage dans les tribunes du PSG avec ses fils en 1994 et une sortie des balladuriens à la montagne en 1996 (après leur défaite, donc).
Dans le même genre, le président confirme (photo à l’appui) qu’il était en tête des cortèges pour la reprise des cours à Nanterre et Dauphine pendant les grèves étudiantes de 1976. Mais il ne mentionne pas son passage (non avéré) à Berlin le jour de la chute du Mur en 1989. Il l’avait pourtant rendu public, photo à l’appui déjà, lors du 20e anniversaire de l'évènement en 2009, contre toute vraisemblance.
L'utilisation faite par Nicolas Sarkozy de Facebook est novatrice, mais la démarche est à double tranchant. Qu'on le veuille ou non, le web a de la mémoire. Difficile, en voyant sur la nouvelle page la belle photo du ministre de l'Economie dans une usine Alstom en 2004, de ne pas penser à cette autre visite chez Alstom (vidéo), ravageuse pour son image, en tant que président en 2009. Celle-ci n'est pas mentionnée sur Facebook.
Nicolas Sarkozy a également ouvert un compte Twitter :