RFI : L’affiche montre un autoportrait, jambes étirées, torse gonflé, véritable superman. Vous avez d’abord commencé par concevoir votre propre image ?
Jean-Paul Goude : C’est une longue histoire. « Touche-à-tout » est un terme péjoratif pour moi. J’utilise beaucoup de techniques, toutes différentes mais le fond de mon histoire est toujours le même.
RFI : Lequel ?
J.-P. G. : C’est ma propre histoire. C’est l’évolution justement de ce personnage que je m’amuse à appeler Goudemalion parce que j’ai eu la chance que ce soit un philosophe célèbre qui me donne ce nom et ça m’intéresse beaucoup d’aller aux sources de son inspiration de ce Goudemalion, ce personnage de fiction. C’est ce que montre l’exposition, c’est son évolution et l’extrême cohérence de son travail. Donc je ne suis pas un touche-à-tout, je suis le contraire : je suis obsédé par la forme comme tous les artistes.
RFI : Et par la perfection ?
J.-P. G. : Non, c’est la forme qui m’intéresse. La perfection c’est aussi péjoratif. C’est la forme qui m’intéresse : comme un dessinateur, comme un sculpteur, comme un artiste finalement.
RFI : Cela a commencé très tôt pour vous : à l’âge de 14 ans, vous avez inséré des talonnettes dans vos chaussures et très vite des épaulettes dans vos tee-shirts. Vous ne vous trouviez pas à vote goût ?
J.-P. G. : Pas du tout ! J’étais mal foutu donc il fallait faire quelque chose, c’est fait.
RFI : Votre attirance pour les ethnies, vous la déployez aussi dans tout votre travail de photographe et de graphiste. Vous avez créé des véritables icônes qu’on retrouve dans l’exposition au Musée des Arts décoratifs. Grace Jones tout d’abord que vous photographiez nue dans une cage. C’est une image qui crée le scandale, qui vous vaut un tollé de la part des féministes.
J.-P. G. : Oui je l’ai fais dans une cage, mais il faut tout remettre dans le contexte des années 1970. Grace s’est toujours promenée à moitié nue partout. L’époque voulait que tout le monde posait nu, c’était presque normal. J’ai profité du fait qu’elle voulait bien se livrer à ce genre d’exercice. Hors contexte, cette image est certes insultante au possible, mais dans le contexte pas du tout puisque Grace a toujours joué la bête sauvage.
RFI : Le coté félin ?
J.-P G : Elle a toujours rugi, griffé les journalistes, c’est son personnage qui était comme çà donc ce personnage ingérable je l’ai mis en prison pour une nuit.
RFI : Il y a aussi Farida, superbe Beur, qui devient une nouvelle icône. Comment vous l’avez rencontrée ?
JPG : Un soir de déprime, j’étais aux Bains Douches [une célèbre boîte de nuit parisienne] et elle m’a gentiment parlé.
RFI : Et la déprime est passée ?
JPG : La déprime est passée tout de suite.
RFI : Qu’est ce qui vos séduit chez une femme, pour avoir envie de la mettre en valeur comme vous savez si bien les mettre en valeur ?
J.-P. G. : Chez une femme ou chez les gens ? Il y a dans mon catalogue un dessin ou il y a écrit « la beauté n’a pas de sexe ». La beauté c’est la beauté. Je peux être touché par le rythme du dessin d’un visage ou le rythme d’une démarche ou un sourire ou une personne qui a une personnalité forte.
RFI : Aimez-vous les personnalités hors du commun ?
J.-P. G : C’est vrai que j’aime les morphologies un peu spéciales. Je n’ai jamais été client de l’esthétique proposé par exemple de Playboy. Les grandes blondes avec une grosse poitrine et les cheveux décolorés ne m’ont jamais attirées.