Tout est mise en scène dans cette 11e Biennale de Lyon. Premier acte : la Sucrière, un ancien entrepôt des années 30. Le spectateur y pénètre en passant par d'énormes silos. Lever de rideau avec l'Allemande Ulla von Brandenburg qui nous présente ses Kulissen, une série de teintures qui ouvrent sur un monde beau et terrible. Comme cette œuvre du Camerounais Barthélémy Toguo. « C'est un ensemble de 55 cercueils qui représentent les 55 pays africains dans la souffrance, dans la pauvreté et avec ses douleurs et je crois qu'on devrait plus voir au fond les causes de ces douleurs que l'Afrique est en train de vivre au jour le jour. »
Autre lutte qui marque les esprits: celui d'un homme nu tirant des sangles noires attachés aux piliers de la Sucrière. « Laura Lima est une artiste dans laquelle je crois profondément, avance Victoria Noorthoorn, la commissaire de cette Biennale. Et notre Puxador, comme on l'appelle, l'homme qui pousse est un rappel à penser qu'une exposition c'est aussi un équilibre qui peut être très facilement déséquilibré.
Puxador
La jeune commissaire argentine a parcouru le monde pour trouver le bon équilibre entre les artistes : un tiers venant d'Amérique du Sud, un tiers d'Europe, un tiers du reste du monde. 70 % des œuvres sont des productions de la Biennale, les autres n'ont jamais été montrées en Europe, souligne le directeur artistique et fondateur de la Biennale, Thierry Raspail. L'idée c'est qu'une Biennale est une exposition qui rassemble le monde en un point, donc aujourd'hui c'est Lyon, mais une Biennale n'est pas qu'une exposition. C'est précisément le moment ou jamais de mettre en œuvre ces utopies, cette imaginaire de l'artiste et de vérifier si, en actes dans la société, il est viable. Et donc, dans une petite ville de la ceinture lyonnaise, nous avons inventé un cube blanc. Ce cube blanc 6 mètres par 6 mètres par 6 mètres est implanté au centre d'une zone HLM. Et nous travaillons avec 11 femmes, 11 demandeuses d'emploi et qui sont à la fois directeur, commissaire, médiateur, gardien. »
Gala Chicken
Dernier acte: l'usine TASE. L'ancienne fabrique de soie inscrite au patrimoine industriel accueille la Biennale pour la première fois. On se croirait même à Rio avec ces 40 poulets affublés de plumes de carnaval, les Gala Chicken de la Brésilienne Laura Lima. Et un poisson à deux têtes et deux jambes, 12 mètres de long qui engloutit les visiteurs consentants. Son créateur est le Néerlandais Michel Huisman. « C'est un poisson qui réfléchit sur l'idée que nous avons deux parties cérébrales. Et donc Callosum, c'est la chambre où on peut rejoindre les deux, mais on peut aussi faire l'amour là-dedans. »
C'est sur une note grotesque, mais aussi optimiste et volontairement joyeuse que se termine le parcours de cette 11e Biennale de Lyon, un parcours sur 13 000 m2 qui devrait satisfaire tous les appétits - qu'ils soient beaux ou terribles.
La 11e Biennale d'art contemporain de Lyon - à parcourir jusqu'au 31 décembre.