Anne Lauvergeon, la patronne d'Areva, remerciée

Après plusieurs mois de suspense, le gouvernement français a annoncé jeudi 16 juin 2011 la nomination de l’actuel directeur général, Luc Oursel, à la tête du groupe nucléaire Areva pour succéder à Anne Lauvergeon, en froid avec l'Elysée. Dans un contexte où le nucléaire est considéré avec méfiance, sa tâche s'annonce difficile et plusieurs chantiers l'attendent.

Alors que la catastrophe de Fukushima a relancé le débat de la place du nucléaire dans le monde, l’Etat, principal actionnaire d’Areva, numéro un mondial du secteur, a décidé de réorganiser cette filière. Une réorganisation où la plus médiatique des patronnes françaises n’a plus sa place. Anne Lauvergeon, qui entretient des relations tumultueuses avec l’Elysée, verra donc son mandat à la tête du directoire d’Areva s’achever fin juin 2011.

Même si elle a contribué à faire d’Areva un géant du nucléaire, Anne Lauvergeon a cumulé plusieurs fautes ces dernières années : le naufrage financier des chantiers EPR, le réacteur nouvelle génération, en Finlande et à Flamanville lui est imputé ; et surtout son incompatibilité avec le patron d’EDF, Henri Proglio, qui était devenu son ennemi juré. L’attelage français Areva-EDF a d’ailleurs perdu en 2010 un contrat de plus de 20 milliards d’euros pour équiper Abou Dhabi.

Pas de « changement d’orientation stratégique »

Dans la perspective de créer un géant français de l’énergie réunissant électricité et nucléaire, entre Henri Proglio et Anne Lauvergeon, il y avait une tête de trop. C’est désormais tranché. Malgré le soutien de son comité exécutif, des syndicats du groupe et de parlementaires de tous bords, Anne Lauvergeon quitte donc Areva, et c’est l’actuel directeur général Luc Oursel qui lui succède.

« Le gouvernement a pris la décision de nommer à la tête de l'entreprise le numéro deux, il y a donc de la continuité. La crédibilité de la filière nucléaire française ne se réduit pas à une personne », a expliqué ce vendredi 17 juin 2011 Nicolas Sarkozy. Le ministre de l’Industrie, Eric Besson, a lui aussi récusé tout « changement d’orientation stratégique ». Décrit comme un « bosseur qui connaît son sujet », Eric Oursel, ingénieur des Mines qui a bâti une grande partie de sa carrière dans l’industrie nucléaire, connaît très bien Areva, un groupe dont les activités s’étendent de l’extraction d’uranium au traitement des déchets en passant par la conception des réacteurs.

Des résultats en baisse

Mais la catastrophe de Fukushima a changé la donne. Comment arriver à vendre des réacteurs de nouvelle génération EPR à près de 6 milliards d’euros l’unité, alors que certains pays comme l’Allemagne, la Suisse et l’Italie ont fait le choix de renoncer au nucléaire ? Areva a d’ores et déjà annoncé des résultats en baisse pour 2011 et 2012. D’autres défis attendent Luc Oursel. Il devra prouver aux pouvoirs publics qu’il peut travailler avec Henri Proglio, son premier client, et orchestrer l’ouverture du capital des mines d’Areva, demandée par l’Etat.

Parmi les autres chantiers qui attendent Luc Oursel : assurer l’approvisionnement des centrales d’Areva dans le monde. Ces dernières années, Anne Lauvergeon a multiplié les accords en Afrique et notamment au Niger, son premier fournisseur d’uranium. Le pays fournira à lui seul la moitié du combustible des centrales nucléaires françaises en 2012. Areva a en effet conclu un contrat avec le Niger pour exploiter le gisement d’Imouraren, dans le nord du pays. Le groupe français a également signé des accords avec la République démocratique du Congo (RDC) dont un accord portant sur la recherche et l’exploitation de futures mines d’uranium du pays.

Pour en savoir plus :

- Le réseau Sortir du nucléaire qui regroupe 874 associations de défense de l’environnement

- L'Agence internationale de l'énergie (AIE)
 

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