Les députés britanniques souhaitaient avoir cette feuille de route entre les mains. Ils l’exigeaient depuis que la Cour Suprême a décidé qu’ils auraient encore leur mot à dire avant que la négociation ne s’engage avec Bruxelles.
La Première ministre Theresa May, elle, ne souhaitait pas initialement mettre noir sur blanc sa stratégie, avant d’entamer les pourparlers avec les Européens. On peut le comprendre : on abat rarement ses cartes avant d’entrer en négociation, mais il lui a fallu faire cette concession, jugée un peu tardive par certains.
Les députés disposent désormais d’une feuille de route, une sorte de cahier des charges qui rappelle ce pour quoi elle va se battre : une sortie de l’Union européenne, sans grabuge ni pour les Britanniques ni pour les Européens. Ce sont 77 pages qui reprennent les 12 principes énoncés dans son discours du 17 janvier dernier. Ce sont des explications faites pour rassurer les Britanniques et pour construire un consensus au Royaume-Uni, afin d’éviter de passer deux ans à négocier pied à pied, et de parvenir à un accord qui risquerait ensuite d’être rejeté par les Britanniques.
Un point de non-retour ?
Un point de non-retour semble franchi, la Chambre des communes a voté ce mercredi, à contrecœur, en faveur du déclenchement de l’article 50 du traité de Lisbonne. Le document publié ce jeudi ne laisse aucun doute sur le fait que le Royaume-Uni sortira de l’UE, et même du marché unique.
Il est exclu d’accepter un statut transitoire à une échéance indéterminée. L’approche vise néanmoins un processus par étape, avec un calendrier différent en fonction des différents dossiers. Qu’il s’agisse, par exemple, du contrôle de l’immigration, des tarifs douaniers, de la façon de coopérer désormais avec le reste de l’Europe en matière de sécurité, de lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Même principe, sur les sujets commerciaux, il y aura des arrangements par secteurs - le livre blanc en compte 58 - et il y aura un calendrier de négociations qui permettra une mise en œuvre par étape.
Le livre blanc mentionne également que le Royaume-Uni devra adopter de nouvelles lois sur chacun de ces dossiers : l’immigration, le système douanier. Il est aussi indiqué dans ce document, que le Royaume-Uni ne sera plus sous la juridiction de la Cour de justice européenne.
Il y a également un engagement à l’égard de tous les membres du Royaume-Uni, y compris les nations constitutives autres que l’Angleterre : le Pays de Galles, l’Irlande du Nord et l’Ecosse, afin que leurs intérêts soient pris en compte. Là encore, le livre blanc tente de désamorcer les rejets de l’accord de sortie de l’UE, de la part de ceux qui souhaitaient le maintien dans l’Union.
Les prochaines étapes
Tout doit être prêt avant la mi-mars, c’est du moins l’ambition affichée par le gouvernement britannique. Le projet de loi doit encore passer devant la chambre des Lords le 7 mars. Enfin, il sera présenté à la Reine pour recueillir son assentiment final.
Pourquoi ces dates ? Un conseil européen est prévu les 8,9 et 10 mars prochain. Le suivant est programmé seulement en juin, donc on peut penser que la procédure de divorce sera bel et bien déclenchée à la mi-mars.
Ensuite, il y aura deux ans de négociation entre Britanniques et Européens, avant qu’un accord soit trouvé et de nouveau soumis au Parlement britannique. Certains réclament même un nouveau référendum en bout de course, mais c’est peu probable, pour l’instant, le gouvernement fait tout pour éviter ça.
Enfin, ajoutons que ce livre blanc ne concerne pas seulement les futures relations avec l'UE, mais aussi les arrangements commerciaux que le Royaume-Uni devra conclure de façon globale, à l'échelle du monde, une fois sorti de l'Union européenne. Tout un travail préparatoire doit être mis en branle, pour parvenir à équilibrer les relations avec d'autres partenaires, en dehors de l'Europe.
Autant dire que le sujet inquiète les Britanniques, notamment lorsqu'ils tournent leurs regards vers les Etats-Unis. C'est ce qui s'exprime d’ores et déjà à la Chambre des communes. L'avènement de l'ère Trump laisse planer de nombreuses questions et cela risque de peser sur la façon dont Theresa May pourra négocier avec les Européens.
→ A (re) lire : Le Brexit, un des grands enjeux européens en 2017