C'est un congrès crucial pour l'AfD, un congrès à la croisée des chemins, rapporte notre envoyée spéciale à Stuttgart, Nathalie Versieux. Le petit parti populiste qui avait créé la surprise aux élections régionales de mars dernier avait été lancé voici trois ans par des déçus du parti libéral. « L’AfD est un parti jeune, qui se cherche encore. Il a commencé, il y a quelques années, à surfer sur des vagues populistes, protestataires contre l’euro. Il s’agissait de gens plutôt libéraux mais anti-euro » explique Henrik Uterwedde, chercheur à l'institut franco-allemand de Ludwigsburg. Les fondateurs étaient avant tout opposés aux plans de sauvetage de l'euro. Il y a un an, son dirigeant d'alors, Bernd Lucke a été évincé « parce qu’il représentait un peu l’aile modérée, libérale, qui voulait se focaliser sur la question de l’euro » poursuit Henrik Uterwedde, chercheur à l'institut franco-allemand de Ludwigsburg. Bernd Lucke a été alors remplacé par Frauke Petry, favorable à une ligne plus musclée à droite, plus anti-immigrés.
A la faveur de la crise des migrants, l'AfD a encore muté. Lâché par sa clientèle aisée de la première heure, ce sont aujourd'hui les couches populaires, les chômeurs et les ouvriers qui lui donnent leur voix. Mais avec la fermeture des frontières dans les Balkans, le parti craint pour son avenir. D'où le repositionnement constaté au cours des dernières semaines. L'AfD « a viré à droite, l’an dernier, en prenant le thème des réfugiés de l’immigration et, aujourd’hui, il a découvert le thème de l’islam qui ne serait pas compatible avec l’Allemagne », analyse Henrik Uterwedde.
L'islam incompatible avec la culture allemande selon l'AfD
L'aile droite du parti a donc trouvé un nouveau thème à même de mobiliser en vue des prochaines régionales en septembre à Berlin : la lutte contre l'islam. Les dérapages verbaux de la direction se multiplient depuis des semaines. Les délégués auront à étudier plusieurs motions demandant l'interdiction des minarets, de la construction de mosquées et du port du voile. Si la lutte contre l'islam fait consensus au sein du mouvement, sa traduction concrète constitue des points de dissensions possibles au sein du mouvement selon Henrik Uterwedde.
« Pour l’instant, l’AfD se marginalise complètement vis-à-vis des autres partis politiques, il n’a pas une option réaliste de pouvoir. Il restera donc dans une posture protestataire qui va peut-être lui suffire, à moins qu’il ne dispose, un jour, d’un groupe parlementaire. Et en même temps, cela limite un peu son influence politique future dans le Bundestag », conclut le chercheur.
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