Avec notre envoyée spéciale sur l'île de Lesbos, Anastasia Becchio
La mer est calme, en ce mardi matin au nord sur l'île de Lesbos. Le visage fatigué, mais le sourire aux lèvres, Wala exhibe ce que les réfugiés appellent entre eux « le papier blanc », un sésame administratif qui permet aux demandeurs d'asile tout juste arrivés de Turquie de circuler librement en Grèce. Et donc, théoriquement, de continuer leur route vers un autre pays européen. Le document est écrit en grec. Il comporte aussi les photos de cet Irakien de Bassorah et de sa famille. Wala nous montre les clichés de sa femme et de ses « bébés », dont Zahara, 5 ans.
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Après quelques jours de répit, en raison de ses vents forts, les traversées en mer ont repris entre la Turquie et les îles grecques. Quasi vide la veille, le centre d'accueil et d'enregistrement de Moria, à Lesbos, a reçu toute la journée de mardi de nombreuses familles avec des enfants en bas âge : des Syriens, des Irakiens, des Afghans. Plus de 700 personnes seront décomptées au total sur une journée. Le centre doit pouvoir gérer jusqu'à 1 000 dossiers par jour. Les Grecs sont pressés de faire plus par leurs partenaires européens, qui demandent à Athènes de stopper le flot des migrants.
Mais les autorités grecques ont réagi. C'est ce qu'explique Michele Telaro, coordinateur de Médecins sans frontières (MSF) à Lesbos : « A Moria, qui est le " hotspot " de Lesbos, ils sont en train d'augmenter la capacité d'enregistrement, de se mettre à jour. Il y a eu plusieurs visites de Frontex (l’agence européenne pour la gestion aux frontières extérieures, NDLR) et des autorités européennes, et donc les autorités sont en train de faire beaucoup à ce niveau-là. Par contre, les autorités ne sont pas encore actives du tout sur tout ce qui concerne l'assistance humanitaire. »
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Ces derniers jours, les mauvaises conditions météorologiques ont donc sans doute ralenti les départs des côtes turques qui se dessinent sur l'horizon. Mais avec le retour d'un temps plus calme, les embarcations chargées de migrants reprennent désormais la mer. C'est ce que constate Nick, qui rentre au port après une heure de patrouille sur son Zodiac : « On a vu un bateau de réfugiés en mer qui a été secouru par un navire de Frontex sous pavillon bulgare », relate-t-il, alors qu'à quelques mètres du port, le centre médical monté par l'association WAHA prodigue les premiers secours aux rescapés.
Ces derniers jours, ce centre était resté vide en raison du mauvais temps. Mais la coordinatrice de l'association Tinou Pai Blanc s'attend désormais à un nouvel afflux : « Nous pensons que le flux recommencera et nous voulons être présents pour les réfugiés qui arrivent. C'est un moment aussi pour nous d'améliorer la qualité de l'accueil, des soins, et de se préparer à la reprise de l'arrivée. Je crois que c'est la démarche de la plupart des ONG et des volontaires qui sont ici », explique-t-elle.
Un sommet européen est prévu jeudi. Il sera en partie consacré à la question urgente des migrations.